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Jean-François Flamey est autodidacte, il aime questionner l'image, ses images, et créer ainsi de nouvelles interprétations, de nouvelles histoires, de nouveaux regards. Son travail photographique est le résultat de prises de vue brutes, en numérique ou argentique (il affectionne les Polaroid), sans retouches ou au contraire soumises à des manipulations diverses : imprimées une première fois, plongées dans des bains de produits mordants ou des colorants, collées sur des papiers glanés de ci de là, mises en culture au fond d’une cave humide ou à même la rue au gré du temps qui passe et de celui qu’il fait… Le résultat est ensuite (re)photographié ou scanné avant d’être imprimé à nouveau, offrant ainsi une autre lecture de l'image initiale. Ici, la photographie est désacralisée et la matière parle autant que la représentation de son contenu. Non Dits, sa première et remarquable monographie, par la qualité d'impression et le choix des images, exprime à merveille l'univers particulier et fantasmagorique de Jean-François Flamey, révélant les ratages et les dérapages des images qui permettent au lecteur de laisser l'imaginaire faire son oeuvre et de réinventer sa propre lecture photographique.
Catherine D.
Paru en septembre 2017.
Quel beau premier roman! Dans Faux départ, on découvre une vrai plume, touchante, acerbe, piquante, teintée de jeunesse mais aussi déjà mature.
Aurélie, héroïne de ce roman, est à l'aube de sa vie adulte. Elle décode déjà fort bien les mécanismes de la société française qui rendent difficile son ascension sociale malgré le discours politique qui promeut l'égalité des chances. Aurélie vient en effet d'une famille ouvrière. On la suit dans ses études, ses petits jobs, ses errances, ses amours, ses galères... D'autres beaux personnages jalonnent ce livre : Alejandro, exilé colombien idéalisant son pays d'origine tout en ne voulant pas y retourner malgré la dureté de sa vie en France; Franck, quadra en mal d'amour; Benjamin qui semble apporter un peu de sérénité dans la vie d'Aurélie.
L'auteur nous livre aussi un portrait terriblement juste (et parfois cruel) de Paris aujourd'hui. C'est un roman à la fois intime et urbain, qui se lit avec fluidité. Une auteur à suivre.
Catherine M
Paru en septembre 2017. Existe aussi en format numérique.
Franz était enfant dans Abraham et fils, le voici adolescent dans Les histoires de Franz. Toujours observateur candide et lucide des années 60-70 dans la petite ville française imaginaire de Tilliers. Tilliers qui ressemble à Pithiviers.
Toujours avide de comprendre ce qui se passe autour de lui, il nous aide à comprendre les mouvements qui traversent ces années où l'émancipation, dans tous les domaines, est en ébullition.
Son papa, Abraham, devient directeur de la maternité. La nouvelle femme d'Abraham, Claire, crée avec deux amies un cercle pour informer les femmes sur la sexualité. Franz grandit et se trouve lui aussi confronté aux médecins, comme patient. On retrouve donc les thèmes chers à Martin Winckler : le soin, la médecine, la santé, l'autonomie. Et comme à chaque fois, l'auteur nous emporte dans son enthousiasme et dans une trame romanesque efficace, fluide, convaincue et convaincante.
On voudrait faire partie de cette famille où l'amour circule, on voudrait faire corps avec les enthousiasmes des personnages dans cette époque de découverte des libertés...
Ne boudez pas votre plaisir, rencontrez Franz et ses histoires qui sont aussi les histoires de France, avec le regard engagé et singulier que Martin Winckler, didactique et chaleureux, porte sur elles.
Vous pouvez rencontrer Martin Winckler à la librairie le lundi 23 octobre à 19h30. La soirée sera suivie d'une séance de dédicaces et d'un verre de l'amitié.
Valentine Goby, on la connaît pour ses romans (notamment Kinderzimmer et Un paquebot dans les arbres, édités par Actes Sud). Ici, elle nous plonge dans l'univers de Charlotte Delbo, écrivaine française, engagée dans la résistance et qui a vécu dans différents camps de concentration. Elle sera libérée à la fin de la guerre et écrira toute une série de romans relatant le vécu dans les camps. Elle meurt en 1985.
Charlotte Delbo fait partie des auteurs de littérature concentrationnaire, au même titre que Primo Levi, Imre Kertész et beaucoup d'autres. Elle sera pourtant longtemps méconnue du grand public. Est-ce parce qu'elle était une femme? Est-ce parce qu'elle semble avoir été heureuse après la guerre? Valentine Goby s'interroge sur ce personnage, sur sa vie après les camps, sur ce que la littérature permet pour survivre à ce genre de tragédie.
Je me promets d'éclatantes revanches est donc un essai littéraire mais se dévore comme un roman. En effet, on est aussi emporté dans l'enthousiasme de l'auteur vis-à-vis de cette femme étonnante. On chemine avec elle à la découverte de Delbo. Une petite pépite qui nous parle des pouvoirs des mots.
Catherine M
Paru en septembre 2017, existe aussi en format numérique.
A la suite d'une rupture affective qui le plonge lentement dans la dépression, l'auteur se voit conseiller une psychanalyse. Rapidement, le psychanalyste l'interroge sur ses parents et révèle des failles, des manques dans la structure familiale. Investi d'une nouvelle mission qui l'éloigne du souvenir douloureux de sa fiancée, Renato Cisneros va alors fouiller dans son passé familial et surtout celui de son père, Luis Cisneros Vizquerra, général militaire surnommé El Gaucho, mort d'un cancer une vingtaine d'années auparavant.
"Tout comme un père n'est jamais préparé à enterrer un fils, un fils n'est jamais préparé à déterrer son père", c'est avec ces mots que l'auteur clôt son roman, consacré à cette figure paternelle aimante, mais stricte et secrète. Le récit de son histoire familiale se transforme peu à peu, au fil des découvertes et des rencontres avec des personnes ayant connu El Gaucho, en une histoire nationale où la personnalité du père se révèle bien plus contrastée et fortement liée aux événements historiques qui ont jalonné l'histoire du Pérou et des pays voisins... Ce père dictateur fut en même temps amoureux des femmes, militaire exemplaire, opposant au régime, ministre de l'intérieur, ministre de guerre, poète à ses heures, ami et fervent admirateur de Pinochet et Videla, féru de littérature, mais insensible aux tortures infligées à son peuple...
Il aura fallu beaucoup de courage et de ténacité à Renato Cisneros pour écrire ce roman particulier, qui navigue entre sphère privée et sphère publique et qui livre le portrait troublant d'un homme que l'on voudrait détester, mais auquel on s'attache paradoxalement. "La distance qui nous sépare" est un roman passionnant et émouvant, tant on en apprend sur l'histoire récente du Pérou tout autant que sur la relation difficile entre un père et son fils.
Catherine D.
Paru en août 2017, disponible aussi en format numérique.
Shell, du nom du blouson qu'il porte toute la journée (et parfois la nuit) sur le dos, est un garçon de douze ans, un ado pas encore ado et pas tout-à-fait comme les autres. Shell est différent, il a d'ailleurs quitté l'école. Il aime les tâches simples, répétitives, mais il a surtout envie de devenir un homme. Et un homme, ça fait la guerre. Alors, quand il entend ses parents, propriétaires de la station service où Shell est heureux de rendre de menus services, discuter un soir de son cas, il prend une grande décision pour ne pas être envoyé dans une institution qui, il en est sûr, ne lui conviendra pas. Il va partir à la guerre, là-haut, de l'autre côté de la colline et démontrer à ses parents qui il est vraiment! Mais de l'autre côté de la colline, c'est une autre surprise qui attend le jeune homme, c'est la plus belle rencontre de sa vie, il va découvrir sa Reine, une jeune fille qui va l'emporter dans un monde fantasque et imaginaire qui lui assurera confiance et sécurité, malgré la vie précaire qu'il va finir par mener...
C'est un roman tout en douceur, empreint de poésie dans son écriture et dans son esprit. C'est une ode à l'imaginaire, à la liberté, à la différence. Un roman qui parle d'apprentissage de la vie, avec le regard d'un enfant qui s'endort quand l'angoisse ou l'émotion est trop forte, ou encore un enfant qui continue de croire aux contes de fée, malgré la dureté de la vie réelle. Un conte initiatique, tout en sensibilité.
Catherine D.
Paru en août 2017, existe aussi en format numérique.
Gros coup de cœur pour ce roman, dur mais magnifique.
Nous sommes quelques mois avant la fin de la seconde guerre mondiale. Pearl et Stasha sont des jumelles âgées de onze ans, qui au début du livre arrivent à Auschwitz avec leur mère et leur grand-père. Leur gémellité attire l'attention de Josef Mengele, officier SS et médecin du camp. Il a rassemblé les jumeaux et les triplés déportés dans son zoo et leur fait subir de terribles expérimentations médicales.
Pearl et Stasha racontent, en alternance, le quotidien au zoo, les personnes qu'elles y rencontrent et les séances avec celui qui se fait appeler Oncle et ses assistants. À la libération, les prisonniers survivants, en grande majorité des enfants, se mettront en route pour essayer de retrouver leurs familles ou un semblant d'espoir de recommencer une vie normale.
Mischling ("bâtard", en allemand) est un livre violent par moments, poignant, écrit dans une très belle langue, avec un beau travail de documentation en arrière-plan. Il ne laissera personne indifférent.
Hélène
Paru en septembre 2017, existe aussi en version numérique.
Razan Zaitouneh est une avocate syrienne militante des droits de l'homme. Elle a disparu depuis décembre 2013, enlevée avec trois autres militants. Justine Augier, qui vit à Beyrouth, fascinée par la figure de Razan, s'est lancée dans l'écriture d'une sorte de biographie basée sur des archives et de nombreux témoignages de ses proches. Et cela a donné naissance à ce magnifique récit, De l'ardeur, qui nous plonge dans la Syrie contemporaine.
Au delà de la portée politique et historique de cet ouvrage, c'est aussi un portrait de femme étonnant qui nous est livré. Razan Zaitouneh est (était?) une femme engagée, militante, dotée d'un caractère fort. Elle va s'intéresser tout particulièrement aux conditions de détention carcérale et se fera beaucoup d'ennemis en dénonçant les mauvais traitements subi par les prisonniers, les problèmes de procédure, d'injustice dans le système judiciaire syrien. Elle sera d'ailleurs suspendue du barreau à la demande d'un juge qu'elle avait mis sous pression dans un dossier.
Justine Augier s'est plongée dans la vie de Razan pendant deux ans, visionnant des archives, interrogeant ses proches, lisant des articles. Elle nous raconte aussi ce travail et le pourquoi de sa démarche. Elle parvient, au fil du récit, à nous entraîner dans son entreprise. On s'attache à ces deux femmes (Razan Zaitouneh et Justine Augier) qui vivent au coeur d'une région du monde secouée de toutes parts depuis de trop nombreuses décennies. Et on espère nous aussi, lecteurs, que Razan est toujours en vie.
Catherine M
Paru en août 2017, existe aussi en format numérique.
Cora, née esclave dans une plantation de coton, réservée mais déterminée, porte en elle un instinct de vie et d'insoumission qui font vibrer ce roman de la première à la dernière page.
Marquée par l'évasion de sa mère, sans elle, quand elle était enfant, Cora s'enfuit avec Caesar de la plantation des Randall en Géorgie quelques années plus tard, toute jeune adulte. Aidée par le chemin de fer clandestin, elle connaîtra la Caroline du Sud condescendante, la Caroline du Nord exterminatrice, elle traversera le Tennessee dévasté, entreverra dans l'Indiana la liberté et la solidarité.
Ce roman terrible rejoint la liste des magistrales dénonciations de l'esclavage, porté dans certains états au rang de meurtre de masse, sans compter les tortures inhumaines pratiquées ailleurs.
Le lumineux personnage de Cora nous permet de garder les yeux ouverts tout au long de ce périple qu'on lit avidement et qui nous rappelle jusqu'où l'être humain peut aller quand il a décidé de dominer ses semblables en les classant dans la catégorie "les autres".
Ce roman, le sixième de Colson Whitehead, a tout simplement reçu le prix Pulitzer en 2016...et le National Book Award, et un immense succès aux États-Unis.
Natacha
Paru en août 2017. Traduit de l'américain par Serge Chauvin. Existe aussi en format numérique.
Dès les premières pages, on sait qu'il y aura un drame, un terrible drame, on sait lequel et on relit les quelques lignes qui l'annoncent l'air de rien, comme un inoffensif constat, on les relit pour être sûr de bien comprendre. Mais les détails, les causes, les étapes, la sourde obstination qui conduira vers cette issue, ne sous sont révélés que lentement, par petites touches, avec toute l'opacité qu'ils gardent aux yeux de la jeune narratrice.
Ladite narratrice habite en bordure d'un lac et devient la baby-sitter du petit garçon qui vit sur l'autre rive. Elle devient proche de la jeune maman, passe de plus en plus de temps dans la maison d'en face.
Une histoire des loups nous plonge dans la forêt, on y navigue en canoë, on y ramasse des cailloux, on y touche des épines de pins, la nature est présente et palpable, on en respire même l'odeur. C'est une des marques de fabrique de l'éditeur Gallmeister. On y plonge aussi dans une petite ville américaine et dans quelques facettes de ces États-Unis si souvent dépeints sans ménagement par leurs propres écrivains : la tolérance de la Justice d'état à l'égard des sectes, le pudibonderie de cette même Justice dans d'autres domaines. Une des questions qui traversent ce roman plein de mystères et de suggestivité est celle de la culpabilité.
Arrivée à la dernière page, j'avais envie de recommencer le livre pour comprendre à nouveau, ou essayer...
C'est un roman hypnotique, en miroir à l'engourdissement de la narratrice face à ses voisins si ordinaires et si secrets.
Natacha
Paru en août 2017. Traduit de l'américain par Juliane Nivelt. Existe aussi en format numérique.
Olivier Nasti, Meilleur Ouvrier de France 2007, est depuis plus de quinze ans le chef du restaurant doublement étoilé Le 64° et le propriétaire de l’hôtel cinq étoiles attenant, Le Chambard. Si l’Alsace est au cœur de sa cuisine qu’il définit comme « un formidable moyen d’expression et de transmission », Olivier Nasti apporte des saveurs plus exotiques à des plats typiquement alsaciens et réciproquement. Cuisine classique et technique, Olivier Nasti revisite les plats traditionnels de la grande cuisine française pour en révéler toute leur délicatesse et leur raffinement, et offrir une expérience à vivre pour l’heureux convive. Grand amateur de pêche, de chasse et de cueillette, cet ouvrage remarquable épouse ses centres d’intérêt en proposant cinq parties : Territoire (Lobe de foie gras poché au vin rouge, pistaches, pommes et oignons), Nature (La courgette trompette cuite entière, oignons caramélisés, flan de cresson et homard bleu cuit au beurre salé), Chasse (Faisan, sauce choucroute), Technique (Pigeon sauce salmi, tagliatelles de céleri) et Desserts (La noisette et le citron). Essentiel et réjouissant !
Catherine D.
Paru en juin 2017.
Avec ce nouveau traité consacré à la bière, les éditions Rustica offre à l’amateur et à l’apprenti brasseur les bases pour comprendre le processus à l’oeuvre dans la fabrication de cette boisson dont la trace la plus ancienne remonte aux Sumériens, 4000 ans avant JC. C’est dire à quel point la bière est un symbole; elle se retrouve partout et en toute occasion, et le registre de ses saveurs semble infini. A l’origine réservé aux femmes, le brassage de la bière n’aura plus de secrets pour les passionnés de ce breuvage après la lecture de cet ouvrage très documenté qui propose en outre de nombreuses recettes “pure bière” comme le Bavarois de bière aux myrtilles et des “recettes incontournables à la bière” telle la traditionnelle Carbonnade à la bière ou encore les Truites pochées à la flamande. A savoir : loin devant le vin, la consommation annuelle mondiale de bière est la plus élevée après le thé !
Catherine D.
Paru en mai 2017.
A l’échelle mondiale, le pain est un élément essentiel de notre alimentation. Quel bonheur dès lors de se plonger dans la lecture de ce très bel ouvrage, destiné avant tout aux professionnels qui souhaiteraient développer leur savoir-faire et parfaire leur technique! Signée par trois professionnels de la boulangerie, Thomas Marie (Meilleur Ouvrier de France), Jean-Marie Lanio et Patrice Mitaillé, la centaine de recettes proposées ici reflète leur envie commune de partager et transmettre leurs connaissances, l’exigence du métier et la fantaisie indispensable pour se réinventer. Outre la fabrication d’un levain dur ou liquide, les recettes sont réparties en six grandes thématiques : Pains régionaux, Pains du monde, Pains spéciaux, Brioches et classiques français, Brioches du monde et Douceurs boulangères. Avec sa photographie soignée et appétissante, voici un incontournable en la matière!
Catherine D.
Paru en juin 2017.
Gros coup de cœur. Pierre, qui s'était juré de ne jamais retourner en centre psychiatrique, fait une nouvelle crise et y est interné une seconde fois. Pierre est bipolaire et a arrêté de prendre ses médicaments. Le livre traite donc en partie de cette maladie, de son séjour dans le centre, des "branleurs de médecins" mais également du mal-être de ce jeune étudiant brillant qui est monté à Paris de son Ardèche natale, qui y est devenu journaliste (de gauche, lutte des classes oblige) et y a épousé une fille de la grande bourgeoisie parisienne (petite fille ou nièce de Paul Claudel, je ne sais plus...). Le style est tranchant et incisif et colle parfaitement au personnage de Pierre, cet écorché vif qui va devoir accepter sa maladie, mais qui va aussi aussi découvrir que les histoires que l'on raconte (ou que l'on tait) de génération en génération ne sont pas toujours vraies et qu'on n'en est pas les dépositaires éternels. Très beau personnage du père de Pierre...
Grégory
Paru en août 2017. Existe aussi au format numérique.
Olivier Chantraine créa Serge Horowitz. Et il vit que cela était bon.
Personnage haut en couleurs, Serge Horowitz incarne l'image du quarantenaire à qui rien n'a jamais réussi, toujours en recherche d'un sens à sa vie : adepte du moindre effort, de la procrastination, vivant aux crochets de sa soeur dont il squatte l'appartement, hypocondriaque, et atteint de troubles d'aphasies chroniques qui lui font perdre toute capacité de parole à des moments de stress plus aigu, il est employé depuis de longues années par l'Offshore Investment Company, un cabinet de consulting international implanté à Paris. Et cela, grâce au concours de son frère, François, Ministre des Finances.
Et pourtant Serge Horowitz n'en est pas moins un personnage des plus sympathiques auquel le lecteur ne pourra que s'attacher. Au fil de nombreuses mésaventures et déconvenues décrites avec force humour par un auteur très inspiré, nous découvrons que Serge est aussi un homme de bon sens et d'idéaux. Lorsqu'il fait capoter le rachat d'une petite entreprise française par une société japonaise, pour avoir dit tout haut ce qu'il pensait de l'honnêteté de ce contrat, son frère, qui semble étonnamment lié à cette affaire, le somme de rattraper son erreur. Et vite fait. Mais Serge Horowitz a choisi la voie de la vérité, et non de la réussite sociale et professionnelle, et fera preuve d'une grande indépendance d'esprit. Il devient "un élément perturbateur", au désespoir de son ambitieux et peu scrupuleux frère qui vient d'annoncer qu'il se présentait aux élections présidentielles, et ne compte pas laisser son cadet entacher sa réputation.
Voici une satire sociale de notre société occidentale qui se savoure. Une comédie rythmée qui nous fait rire par ses dialogues acérés, le burlesque de certaines situations décrites, la modernité de son ton, totalement décalé.
Un moment de lecture jubilatoire !
Delphine
Paru août 2017. Existe aussi au format numérique.
Génialissime, original, littérairement travaillé ; voilà une histoire de piraterie et de chercheurs d'or qui sort de l'ordinaire. En effet, dès les premières pages, le récit du naufrage imaginaire du bateau du pirate Henry Morgan (1635-1688) capte notre attention et nous entraîne dans une contrée sauvage et mystérieuse, à la nature luxuriante.
Le roman, teinté de réalisme magique, nous présente auprès de personnages hauts en couleurs, originaux, dotés de caractères bien trempés. Plusieurs d'entre eux cherchent trois siècles plus tard le mystérieux trésor que l’équipage du capitaine Morgan aurait abandonné dans une région désormais agricole où la culture de la cane à sucre et le commerce du rhum ont fait la fortune de certains. Mais la richesse, la découverte de ce trésor, fera-t-elle leur bonheur ?
Le titre "Sucre noir" est une évocation au pétrole. Le Vénézuela (où l'auteur a vécu de nombreuses années) est en effet riche en pétrole, cela a-t-il fait pour autant le bonheur des citoyens de ce pays ? Rien n'est moins sûr. Et si cette découverte n'était pas à l'origine de leur perte justement ?
Avec ce roman d'aventures, Miguel Bonnefoy dresse une sorte de fable philosophique entraînante. Un auteur à découvrir assurément, qui sera présent à la librairie le mardi 28 novembre à 19h30 pour une rencontre qui s'annonce passionnante!
Catherine M
Paru en août 2017, existe aussi au format numérique.
Dylan est un géant tatoué qui a grandi dans un petit cinéma d'art et d'essai. Après la mort de sa mère et de sa grand-mère, et alors que le climat se refroidit de jour en jour, il quitte Londres pour rejoindre la caravane que la première lui a laissé, tout au Nord de l'Écosse. Là, il fait la connaissance de ses voisines: Constance, une femme solitaire et débrouillarde, parée pour cette nouvelle ère glaciaire qui s'annonce, et sa fille adolescente, Stella. En leur compagnie, Dylan fréquente les différents personnages qui peuplent ce drôle de petit village situé entre mer et montagne, d'où l'on peut voir un iceberg venu de Scandinavie se rapprocher des côtes, lentement mais inexorablement. Et cette ombre d'incertitude qui plane sur leur avenir amène les protagonistes à se concentrer sur leurs histoires familiales - le deuil, la filiation, le rejet, tout en resserrant leurs liens pour s'entraider et se protéger.
Jenni Fagan nous offre ici un roman lumineux aux personnages attachants, dont la lecture donne envie de se pelotonner au chaud tandis qu'une épaisse couche de neige tombe silencieusement.
Hélène
Paru en août 2017, existe aussi au format numérique.
C'est un moment dans la vie, c'est un retour, pour la narratrice, aux sources de son enfance, oubliées, enfouies dans sa mémoire.
Le nouveau livre de Julie Wolkenstein retrace la rencontre de deux chercheurs, Paul et Sophie, comme dans Les vacances de la comtesse de Ségur. Paul et Sophie s'intéressent justement à l’œuvre de Ségur et à l'adaptation, par le cinéaste Eric Rohmer, des Petites filles modèles, film qui n'a jamais vu le jour.
Un livre savoureux écrit par une plume légère et enjouée.
Véronique
Paru en août 2017, aussi disponible au format numérique.
Ophélie Véron, chercheuse en sciences sociales et auteure du blog Antigone XXI, nous propose ici un ouvrage ultra-complet sur le véganisme et toutes les facettes de ce mode de vie. Les aspects philosophiques, politiques et historiques sont abordés en première partie de l'ouvrage, tandis que la seconde partie est consacrée aux aspects plus pratiques: l'alimentation, la consommation (habillement et autres), les loisirs... Véron répond avec beaucoup de sagesse aux "pourquoi?" et aux "comment?" du véganisme, ce qui donne un excellent guide pour les "débutants", mais aussi pour les simples curieux et curieuses.
Hélène
Paru en mai 2017. Aussi disponible au format numérique.
Voilà un livre drôle, déroutant, désabusé, surprenant, ironique, voire cynique... bref un bouquin qu'on aime.
Dans ce roman, Olivier El Khoury nous dépeint le portrait d'un jeune en route vers l'âge adulte. Les réflexions du jeune "héros" de Surface de réparation oscillent entre celles d'un adolescent fatigué de devoir se construire une image aux yeux de son entourage et des pensées plus philosophiques sur la vie et le monde. Fan du club de Bruges, le narrateur n'est ni pour Anderlecht, ni pour le Standard, il n'est ni un Rouche, ni un Mauve.. mais il est quoi alors ? Il n'est pas tout à fait adulte, plus tout à fait enfant, il est entre deux. Il fait des études mais ne sait tout à fait pourquoi... Et finalement, est-ce un problème ? Faut-il toujours un fil conducteur clair dans une vie ?
Comme le héros du livre, on déambule dans ce roman, à travers des chapitres qui nous font voyager, qui sont parfois sans queue ni tête et c'est très bien ainsi. La plume est fluide, belle, tantôt rude, tantôt poétique.
Premier roman d'un auteur d'origine namuroise, Surface de réparation est une belle réussite et le nom d'Olivier El Khoury est assurément à retenir pour suivre la suite de ses aventures en littérature.
Catherine M
Paru en août 2017. Existe aussi au format numérique.
Avec Éléphant, Martin Suter nous plonge dans une histoire de développement scientifique aussi palpitante qu’inquiétante, le tout sur fond de chronique sociale du Zürich d'aujourd'hui. En effet, une bonne partie des personnages de l'histoire sont issus de la rue et n'en sont pas moins des héros. L'auteur nous raconte leur quotidien, la débrouille pour trouver une planque sans être vu des autres, l'ennui de la journée qu'on comble à coup de canettes, de rencontres et de verres partagés.
Schosch, SDF depuis neuf ans, fait un soir une rencontre bien mystérieuse qui va bouleverser sa vie. Alors qu'il rentre "chez lui", une grotte bien cachée par des buissons en contrebas d'une route peu fréquentée, il lui semble apercevoir un petit éléphant rose... Il attribue cette première rencontre aux effets de l'alcool. Mais le lendemain, quand il découvrira les bouses d'éléphant et apercevra à nouveau l'animal, le doute n'est plus permis. Picole ou pas, l'éléphant est bien là... Valérie, vétérinaire des animaux de la rue, va l'aider à comprendre d'où vient cet étrange animal et surtout comment le soigner. Parallèlement, les scientifiques à l'origine de la naissance de cette créature n'ont qu'une idée en tête, remettre la main sur cet éléphant qui pourrait les rendre richissimes et célèbres. Schosch, Valérie et Kaung, un cormac birman qui a accompagné la naissance de l'éléphanteau, ne voient pas ça d'un bon œil et vont tout faire pour protéger le petit animal.
Construit avec beaucoup d'humour et de rythme, ce roman se dévore, on s'attache aux personnages, on en apprend beaucoup sur les éléphants et la condition animale. Et on passe un super moment de lecture.
Catherine M
Paru en août 2017. Traduit de l'allemand par Olivier Mannoni. Existe aussi en format numérique.
Mercy, Mary et Patty, ou trois jeunes femmes qui ont osé défier la société bien-pensante dans laquelle elles ont été éduquées pour rallier la cause de ceux qui les ont kidnappées : les deux premières au XVIIe et XVIIIe siècle, la troisième au XXe siècle. Et c’est autour de cette dernière que les recherches menées par Gene Neveva, professeure universitaire américaine exilée pour un an dans les Landes françaises, et Violette (rebaptisée Violaine), son assistante française, vont se focaliser. Patty, pour Patricia Hearst, cette héritière de 18 ans qui sera enlevée par un groupuscule révolutionnaire en février 1974 et qui va progressivement embrasser leurs idéaux, jusqu’à manier les armes lors d’un braquage quelques semaines plus tard. En cavale, elle sera finalement arrêtée en 1975 et, en prévision du procès, les avocats du clan Hearst vont chercher à s’entourer de spécialistes en tous genres, dont Gene Neveva, avec la mission toute délicate de prouver que Patty (devenue Tania au sein du groupuscule) a subi un lavage de cerveau et qu’elle est victime du syndrome de Stockholm. C’est avec le regard tendre et naïf de Violaine que Neveva va revisiter toute cette affaire, cette même Violaine/Violette dont la vie va être à tout jamais bouleversée par cette quinzaine vécue en-dehors du temps. Les conclusions de Gene Neveva sont fortement attendues dans ce procès, car elle-même a tourné le dos à l’establishment et a acquis une certaine célébrité dans son pays…
Dans ce nouveau roman qui mêle subtilement réalité et fiction, il est question de rencontres, de liberté et d’emprisonnement, et à travers ces trois, voire six personnages féminins (féministes ?) réels et fictionnels, Lola Lafon questionne habilement les conséquences de l'anti-conformisme et les peurs qui l'accompagnent, cette crainte à l'encontre de celles qui défient les lois "naturelles" et qui va mener la petite fille riche devant un tribunal sans savoir précisément de quelle nature est son crime, puisque la seule revendication de Patricia Hearst était sa soif de liberté… Grâce à cette lecture, notre connaissance de cet épisode qui a marqué l’adolescence des jeunes Américain-e-s s’en trouve enrichie et on a envie de mener ses propres recherches pour comprendre à quel moment tout bascule, ce point de non-retour qui nous fait tourner le dos à nos origines et à notre vie d’avant. Fascinant, ce roman à voix multiples met en lumière de façon singulière et percutante ces destins de femmes libres, qui ont traversé les siècles, et qui continuent de questionner la condition féminine actuelle.
Catherine D.
Paru en août 2017. Aussi disponible en format numérique.
Guillaume Poix, jeune dramaturge français, signe un premier roman saisissant. D'une langue acérée et inventive, il nous plonge dans le monde apocalyptique des décharges de produits électroniques à Accra, au Ghana.
Partant d'une réalité connue et malheureusement authentique, l'auteur nous propose de faire connaissance avec Isaac, Moïse et Jacob qui, du haut de leurs jeunes années, vivent de la "fouille" de la décharge à ciel ouvert, celle qu'on nomme "La Bosse". Histoire de gagner quelques "cetis" (monnaie ghanéenne), de survivre surtout. Mais ils ne sont pas dupes et savent que la survie ne sera que de courte durée car l'inhalation des produits toxiques les tue à petit feu. On y rencontrera aussi Thomas, jeune photographe franco-helvète idéaliste, venu sur place pour réaliser un reportage photographique, et dont le chemin va croiser celui des garçons.
Les trois jeunes Ghanéens créent des liens, travaillent en équipe, s'entraident. Parlent le langage argotique de la Bosse, propre à ses adeptes, et particulièrement savoureuse. Il y aura même quelques moments de grâce comme ce match de foot organisé vaille que vaille sur la décharge, avec une pelote de fils conducteurs en guise de balle...
Mais les destins de ces personnages de fiction sont rattrapés par la noirceur de la réalité. Celle que nous décrit Guillaume Poix est d'autant plus écoeurante qu'elle est le résultat d'une surconsommation électronique dont notre société est responsable : obsolescence programmée, cynisme du monde occidental qui rejette sur le continent africain les déchets qui l'encombrent et refuse d'ouvrir les yeux sur les conséquences terribles de ces pratiques, rien ne nous sera épargné. Jusqu'à la chute, vertigineuse, où nous plongeons encore plus loin dans l'horreur.
Les fils conducteurs marque par son écriture au vitriol, nous happe et laisse des traces certainement profondes. Une lecture parfois difficile, douloureuse mais forte. Qui nous traverse comme une décharge électrique.
Delphine
Paru en août 2017. Existe aussi au format numérique.
Le nouveau roman de Marie Darrieussecq raconte une cavale: celle d'un groupe de personnages, certains en double exemplaire, certains un peu déglingués, tous habités par la volonté de détruire ce qui les a amenés là, pour tout recommencer. Marie, la narratrice, était psychologue. Elle raconte comment elle s'est retrouvée dans la forêt, les rencontres qu'elle a faites et qui lui ont ouvert les yeux sur ce monde où les corps n'appartiennent pas à qui on pourrait le croire, mais où les âmes luttent. L'écriture est franche, concise et nous tient en haleine jusqu'au bout.
Une chouette lecture, un peu dystopique, un peu décalée, qui nous rappelle (en plus trash) Auprès de moi toujours d'Ishiguro.
Hélène
Paru en août 2017. Aussi disponible en livre numérique.
La chambre des époux est un livre d'une infinie richesse. Il aborde avec douceur, et avec l'intelligente finesse qui caractérise Éric Reinhardt, la cruauté de l'irruption de la maladie dans une histoire d'amour au long cours, une histoire de couple. Et c'est un coup de projecteur porté sur l'amour et sur la vie que l'auteur nous offre en racontant le cancer et la lutte pour la guérison.
Il nous offre aussi le portrait d'un narrateur dont l'amour semble parfait, il se rêve comme chacun voudrait se rêver face à l'épreuve et sans pourtant faire l'impasse sur les réalités les plus crues qui traversent la relation amoureuse, que la maladie y fasse irruption ou pas.
Au fil de la lecture, nous nous interrogeons : qu'est-ce qui est le plus vrai ? La réalité de l'évènement, ou le roman que l'on s'en raconte ?
Récit avec un roman caché dedans, à moins que ce soit un roman dans un roman, La chambre des époux bouleverse, décode, donne à penser, nous présente un miroir et nous brûle par sa sincérité, réinvente la vie, nous fait rire et pleurer : de la littérature, tranchante et splendide.
Natacha
Parution le 17 août 2017. Existe aussi en format numérique.