Décrire cinq années de la vie de ce monstre sacré du cinéma français qu'est Gérard Depardieu était un projet ambitieux. Mais Mathieu Sapin n'a vraisemblablement pas froid aux yeux car il s'est lancé dans l'aventure avec enthousiasme et a passé beaucoup de son temps à suivre le comédien sur ses tournages, entre 2012 et 2016. Une expérience sans doute pas de tout repos... Carnet de croquis à la main, il l'a accompagné à travers le monde et a croqué son quotidien avec humour mais aussi pas mal de respect pour l'homme. Il faut dire que dans cet album de BD-reportage, on découvre un Gérard Depardieu sans doute plus vrai que nature, un homme au caractère entier, à la fois insupportable et attachant, qui semble dévorer la vie à pleines dents. Si Mathieu Sapin est resté dans l'ombre du comédien, il n'en a pas moins partagé certaines aventures, formant parfois un duo improbable mais touchant avec Gérard Depardieu : gentil petit Sapin et grand méchant Depardieu. On ne peut que savourer certaines scènes décrites dans l'album, notamment celle où Mathieu Sapin accompagne Gérard et son équipe dans le sauna brûlant d'un haut gradé russe, épreuve d'autant plus éprouvante qu'ils avaient dû accepter "quelques" vodkas pour faire honneur à leur hôte avant de rejoindre le sauna...
Bref, le récit est rythmé et vraiment détonnant par moment, mais on sent que les liens tissés entre les deux hommes au fil de ces cinq années sont sincères et respectueux.
Un roman graphique étonnant à découvrir sans hésiter, qu'on aime ou pas le grand Gérard Depardieu ! Réjouissant !
Delphine
Paru en mars 2017.
Isadora Duncan, figure mythique de la danse du début du XXe siècle, prend vie dans cette bande dessinée passionnante. Le lecteur est happé par ce récit virevoltant, assez virtuose, qui traverse les décennies et les continents, sur les traces de cette Isadora, terriblement libre et attachante. On découvre des décors vivants des grandes villes au début du XXe siècle (Paris, Londres, Berlin, Moscou, New York...), des personnages qui ont marqué l'histoire de l'art (comme ce Rodin par exemple dont le travail subjugua Isadora). La vie tumultueuse de la danseuse est captivante, on sent qu'Isadora est portée par un élan, une fougue, une envie de vivre qui fait peu de cas des qu'en-dira-t-on : elle dansait presque nue sur toutes les grandes scènes, improvisant des danses très spontanées, presque mystiques, proches de l'esprit de l'Antiquité. Une liberté d'expression qui lui valut la gloire et la notoriété mais qui faisait aussi crier au scandale. Cette même liberté marqua sa vie amoureuse, ses relations avec sa famille, son rapport au monde et à la vie. Car Isadora Duncan était une femme forte et indépendante, jusqu'à la fin de sa vie, qui se clôt de manière tragique.
Le duo formé par Julie Birmant au scénario et Clément Oubrerie au dessin n'en est pas à son coup d'essai, puisqu'ils avaient déjà signé ensemble la tétralogie "Pablo", consacrée à Pablo Picasso. Ils se sont attaqués cette fois, et avec le même talent, à une autre légende, et à une personnalité solaire qui ne laisse personne indifférent. Le scénario est bien ficelé, la narration enlevée, le dessin très expressif. Bref, une belle réussite !
Delphine
Paru en avril 2017.
Michaël Olbrechts nous plonge, le temps d'un week-end, dans l'intimité d'une famille comme les autres, réunie autour de Pépé Louis. Son épouse a en effet décidé de rassembler tous ses proches pour "fêter" le dernier jour de Louis à la maison, avant qu'il ne parte en maison de repos. Car depuis sa crise d'apoplexie quelques mois plus tôt, l'octogénaire n'est plus que l'ombre de lui-même et son épouse a dû se résigner à le placer. Mais la réunion de famille s'avérera plus tumultueuse que prévu, et fera resurgir de vieilles tensions... Mais aussi de vieux souvenirs empreints de nostalgie.
Caustique chronique sociale relevée par un dessin presque caricatural, ce roman graphique décrit aussi très justement les relations entre les personnages, les émotions sous-jacentes et dépeint avec tendresse l'histoire de cette famille, depuis 44 ans, jusqu'à l'évocation de cet énigmatique Ronny... Le dessin restitue aussi avec un certain charme les ambiances de ce petit village de province sous la chaleur estivale. Voici un album doux-amer qui se lit avec plaisir.
Delphine
Paru en mars 2017.
Deuxième volet d'une trilogie, faisant suite à "D'ailleurs les poissons n'ont pas de pieds", "A la mesure de l'univers" est un magnifique roman qui nous transporte en Islande. On voyage dans trois époques, les années 30 où la pêche semble organiser toute la vie de l'île, les années d'après-guerre avec la présence de l'armée américaine par la biais d'une importante base militaire qui pèse sur tout le pays, et l'époque actuelle où l'on retrouve notamment certains personnages qui se sont "échappés" de l'île pour vivre une vie loin de la pêche et du microcosme islandais. On sent que ce pays, où les étés sont clairs et les hivers une sorte de longue pénombre, est particulier de par sa position géographique, de par son histoire, de par sa proximité avec un océan tout à la fois paisible et déchaîné.
Rempli de poésie, d'émotions, d'amour, ce livre est un non seulement une magnifique histoire de famille et de transmission mais aussi une ode à la littérature tant la langue utilisée est belle, juste. On ne compte plus les phrases qu'on a envie d'épingler au cours de la lecture.
Cette lecture est une des plus belles que j'ai faites cette année et je suis rentrée sans problème dans le roman bien que je n'ai pas lu le premier volet de cette histoire (qui est, cela dit, magnifique aussi parait-il, et disponible en poche chez Folio).
Voici un auteur à découvrir sans hésiter.
Catherine M
Paru en avril 2017, traduit de l'islandais par Eric Boury. Existe aussi en format numérique.
Le titre de ce roman lui va comme un gant et rend bien compte du talent de Gornick à dresser le portrait de sa mère et d'elle-même, prises dans une relation qui les enserre l'une et l'autre dans une toile d'araignée passionnée. Vivian Gornick est journaliste et essayiste, elle évoque sa propre histoire dans ce livre et cela se passe à New York, notamment dans le Bronx où les Juifs, les Irlandais, les Italiens se côtoient au sein des mêmes immeubles et quartiers.
Enfant et adolescente, Vivian est entourée de femmes au milieu desquelles sa mère tient les rênes, bien campée sur un mélange de convictions communistes et d'échappatoire romantique, puis bientôt veuve et entoilée dans son deuil. Mais il y a aussi Nettie, séductrice et sensuelle, Mrs. Kerner qui a perdu les pédales et bien d'autres qui jalonnent le parcours de la jeune fille et qu'elle observe avec une acuité merveilleuse.
Attachement féroce fait partie des romans qui aident à vivre en mettant des mots d'une grande justesse et d'une grande beauté sur nos labyrinthes parfois obscurs. Il est aussi jubilatoire dans son humour mordant !
Ce livre est paru en 1987 aux États-Unis et ceci est sa première traduction en français.
Natacha
Paru en janvier 2017. Traduit de l'anglais (États-Unis) par Laetitia Devaux. Existe aussi en format numérique.
"Partout dans le monde, des hommes et des femmes refusent la logique capitaliste et combattent les injustices. Certains de ces combats mènent à des victoires… Non seulement les alternatives existent, mais elles sont innombrables. Beaucoup sont simples, cohérentes, et pourraient être mises en œuvre dès aujourd’hui avec un peu de volonté politique."
Olivier Bonfond fait partie de ces gens que l'état du monde, (de la société, de la planète), ne décourage pas. Parce que, écrit-il, les solutions existent : il en énumère deux cents, certaines d'entre elles étant déjà mises en œuvre un peu partout. Pourquoi tuer TINA, « There is no alternative », l'expression fameuse de Margaret Thatcher ? Parce que cette affirmation est parfaitement mensongère, même si la propagande de nombreux « experts » prétend le contraire.
Il existe au moins trois bonnes raisons de lire ce livre : D'abord, on peut l'ouvrir à n'importe quelle page, (faites l'expérience!), on y trouve au moins une bonne idée et deux précieuses informations ; ou l'inverse. Ensuite, il (ré)concilie les amoureux du film « Demain » et les partisans du « Grand Soir », (un exercice un peu acrobatique) : le lien entre les deux démarches étant la mobilisation citoyenne. Enfin, et bien que l'auteur s'en défende, ses deux cents propositions pourraient être le programme d'un gouvernement d'unité populaire : un Podemos à la française ou à la belge, l'alternative plutôt que l'alternance. (1)
Mais Il faut tuer TINA n'est pas un énième livre d'imprécations : il ne s'attaque pas à des personnes (à l'exception de Barroso. On admettra qu'il y a de quoi…), mais à des structures, à des mécanismes d'exploitation ou d'oppression. En outre, il alterne – et c'est presque une méthode – les dénonciations (de situations inacceptables) et les motifs de se réjouir (de petites ou de grandes victoires). Quelques exemples : La multinationale Monsanto obtient l'interdiction légale, pour les paysans, d'utiliser, selon une pratique millénaire, leurs propres semences. En revanche, la Bolivie expulse du pays, après leurs multiples abus, les géants Coca-Cola et MacDo. Ou bien : la bataille de l'eau. L'accès à l'eau pour tous est de plus en plus compromis par les privatisations du secteur. Pourtant, en 2011, suite à une mobilisation citoyenne exceptionnelle et à un vrai débat démocratique, l'Italie, par referendum, vote à 95 % contre la marchandisation de l'eau. Ou encore : partout, la publicité envahit l'espace public, les médias – ces armes de distraction massive, comme dit joliment l'auteur – vendent à leurs annonceurs du temps de cerveau disponible. On estime à 500 milliards de dollars l'ensemble du budget de la publicité dans le monde ! Mais la Ville de Grenoble décide, en 2014, de bannir la publicité de ses rues, en décidant de ne pas renouveler le contrat qui la liait au groupe Decaux, qui y avait placé plus de 300 panneaux.
Certaines informations susciteront l'indignation, comme cet argument cynique du lobby du tabac qui souligne , auprès des pouvoirs publics, l'impact positif sur les finances publics de la mortalité due au tabac. (Un mort ne perçoit plus de pension!) D'autres passages provoqueront l'hilarité. En novembre 2009, la Banque mondiale décide de financer un projet au Pérou pour retarder la fonte des glaces : il s'agit de repeindre en blanc les parties brunes du glacier andin, qui absorbent plus de chaleur. Capitalisme vert … ou blanc , sauvons le climat à coups de pinceau !
Un mot, encore, sur le chapitre consacré au problème de la dette. On se rappellera qu'Olivier Bonfond s'était déjà fait connaître, en 2012 , par un livre qui examinait la légitimité de la dette publique (2). Il a également participé, à Athènes, au travail de la Commission pour la Vérité sur la dette grecque, (travail hélas enterré par Alexis Tsipras). C'est donc en connaissance de cause qu'il étudie ici les dettes publiques du Mexique comme de la Russie, de l'Argentine comme de l’Équateur, ou de ... l'Allemagne, avec les solutions différentes, souvent surprenantes, qui y ont été apportées.
Refuser de payer la dette, souligne-t-il, c'est obliger les créanciers à « sortir du bois ». Les identifier permet de les traiter différemment : un petit épargnant, une banque, une multinationale de l'assurance, ce n'est pas pareil.
Il faudrait encore mentionner les chapitres consacrés aux médias, au féminisme, aux institutions internationales, à l'agroécologie, mais puisqu'il est impossible de résumer en quelques lignes un livre aussi dense, concluons par deux réflexions.
Ce livre ne se fixe pas naïvement comme objectif d'établir le paradis sur terre. Mais, en même temps, il propose d'éviter de se limiter à des changements à la marge, qui laisseraient le système intact. Il ne s'agit pas d'être des activistes marginaux qui, de temps en temps, « font le buzz », mais de transformer un bloc social en force politique.
D'autre part, nous ne sommes pas dans un catalogue de lamentations. Au contraire, l'auteur parvient à nous convaincre que s'engager pour changer le monde ne rend ni triste, ni malheureux. La lutte est, au contraire, un facteur de joie et d'émancipation personnelles.
C'est sans doute la raison pour laquelle le site qu'Olivier Bonfond anime s'appelle « Bonnes nouvelles ».
Michel Brouyaux, ancien libraire, toujours passionné.
(1) On peut aussi, bien entendu, utiliser le livre en allant directement au sujet qui nous motive le plus : rôle de la finance ? Démocratie ? Féminisme ? Migrations ? (se reporter à la table des matières)
(2) Et si on arrêtait de payer ? Olivier Bonfond. Editions Aden, 2012.
Avec ce très bon premier tome de sa nouvelle trilogie, Arnaldur Indridason nous plonge dans une période trouble de l'Histoire de son Islande natale, l'occupation anglaise et américaine au début de la deuxième guerre mondiale. Un représentant commercial, Eyvindur, est retrouvé mort au domicile d'un autre représentant, Félix Lunden, tué d'une balle provenant d'un Colt américain et marqué d'une croix gammée sur le front avec son propre sang. C'est le début d'une enquête menée par Flovent issu de la police criminelle islandaise, secondé de Thorson, Canadien né de parents islandais et donc parfait bilingue, désigné par l'état major américain qui ne croit pas en la capacité des Islandais à résoudre cette affaire... Tour à tour, nous allons les accompagner dans la compréhension de la personnalité de la victime, ainsi que de ses proches, pour en arriver à l'intérêt que les Nazis portaient à la race nordique des Islandais et du coup, à leurs recherches anthropologiques et génétiques pour retrouver cette "race restée pure depuis les Vikings", le tout mâtiné d'espionnage et de contre-espionnage... Plus qu'un excellent roman policier, il s'agit également ici de l'exploration sociale et historique du contexte particulier de cette époque, la "Situation", qui a amené nombre de jeunes femmes à rencontrer et séduire les soldats étrangers en espérant ainsi échapper à leur destin souvent pauvre et rural.
La force d'Indridason est de retranscrire avec force et sensibilité tout ce contexte historique méconnu dans nos contrées, tandis que nous nous attachons progressivement aux personnages des deux enquêteurs, inexpérimentés mais volontaires à la recherche de la vérité. Un très bon polar, au rythme plus lent, mais à l'atmosphère dense et palpitante! On attend avec impatience le tome 2, dont le premier chapitre clôt l'ouvrage.
Catherine D.
Paru en février 2017. Existe aussi en format numérique.
Hervé Le Corre n’a pas son pareil pour nous plonger dans des univers sordides, où chaque personnage tient le cap de sa vie comme il peut, toujours à la limite d’une rupture… Roman noir, un peu social, à l’écriture tranchante et juste. Coincé dans une maison perdue de la campagne girondine, Franck, qui vient de sortir de prison, attend le retour de son frère, Fabien, parti conclure une affaire en Espagne. Entouré de sa belle-famille qui l'a recueilli, Franck ne sait comment tuer le temps autrement qu'en voulant séduire Jessica, copine de Fabien, lunatique, névrosée et toxicomane à temps partiel, ainsi qu'en participant aux petites combines de ses beaux-parents qui permettent à tout ce petit monde de vivoter. On en sait ni trop ni trop peu, juste ce qu’il faut pour avoir envie de percer les zones d’ombres dont sont entourés les protagonistes et que cesse enfin cette chaleur accablante, cette tension pesante. Frank va replonger et les évènements vont le dépasser. Lu d’une traite !
Gregory R.
Paru en janvier 2017. Existe aussi en format numérique.
Nous sommes en 2018, Bachar-Al-Assad est arrêté et va être jugé pour crime. Dans ce livre, l'auteur imagine la discussion que pourrait avoir Bachar-Al-Assad avec son avocat en vue de préparer sa défense. Est-il un monstre ? Est-il violent, sanguinaire, calculateur ? Comment peut-on comprendre cet homme qui ne désirait pas gouverner ?
Bien qu'on soit dans une fiction, l'ouvrage est fortement documenté et nous permet de découvrir la vie des Al-Assad. Le narrateur revient sur l'histoire du père de Bachar, sur la manière dont il a pris le pouvoir et gouverné, sur les relations de la Syrie avec les autres pays du Moyen-Orient depuis une demi-siècle. C'est une oeuvre très agréable à lire où on apprend beaucoup de choses sur le Moyen-Orient et sur Bachar.
Catherine M.
Paru en février 2017.
Nimrod, auteur tchadien, résidant en France, nous livre ici une histoire passionnante. Ce livre est édité dans la collection "Sur le fil" des éditions Bruno Doucey, collection qui raconte le destin de poètes qui croisent la grande histoire. Dans "L'enfant n'est pas mort", c'est une poétesse, Ingrid Joncker, que nous découvrons. Elle vit en Afrique du Sud, dans les années 60 et écrit des poèmes magnifiques, politiques, engagés, intimes qui seront malheureusement en grande partie censurés. Jeune femme blanche, elle s'insurge contre les atrocités que subit la population noire et écrit notamment un poème splendide à la mémoire d'un bébé noir tué par la police lors d'un banal contrôle d'identité.
Elle sera méprisée par sa famille et par sa propre communauté qui ne la comprend pas. Son père qu'elle tente d'éblouir toute sa vie, finira par la renier. En 1994, lorsque Nelson Mandela arrive au pouvoir, il ouvre son premier discours au parlement par le lecture d'un poème d'Ingrid Joncker et va largement contribuer à réhabiliter sa poésie. Dans le roman, on voyage entre les années 60 et la vie de la poétesse et la vie de Mandela qui découvre sa poésie en prison. C'est un texte magnifique qui nous offre une plongée dans l'Afrique du Sud et dans la milieu de la littérature sud-africaine. C'est aussi un livre terriblement intime.
Catherine M.
Paru en février 2017
Des Etats-Unis à la France en passant par Berne, Berlin et Moscou, de la télé-réalité au Bauhaus, on traverse avec ce Bal mécanique un siècle d’Histoire et de culture, de modernité et d’avant-garde, des spoliations nazies aux « purges » opérées dans ces émissions télévisuelles si convoitées pour téléspectateurs en mal de gloire éphémère.
Roman scindé en deux grandes parties faisant référence à deux périodes historiques éloignées et à la chronologie éclatée, nous sommes plongés dès la première ligne dans le tournage de l’émission de téléréalité créée par Josh Shors, qui connaît un immense succès aux Etats-Unis. Son père octogénaire, Carl, artiste-peintre renommé, alcoolique et dépressif, vit dans un petit village français et ne semble pas très proche de son fils. Lui-même est le fils de Théodore Grenzberg, grand marchand d’art du début du 20ème siècle en Allemagne, qui a préféré confier son fils à un couple d’amis en partance pour les Etats-Unis lors de la montée du nazisme. Dès lors, Carl est déraciné et ne reverra plus jamais ses parents pris dans le tourbillon de l’Histoire. Un peu par hasard, en lisant le journal, celui-ci va faire une découverte qui va bouleverser sa fin de vie et par ricochet, celle de son fils et de sa belle-fille… On amorce alors la deuxième partie du livre qui met en lumière la célèbre école artistique du Bauhaus à travers le personnage lumineux et libre de Magdalena, jeune femme indépendante des années '20, dont le parrain n’est autre que Paul Klee, grand ami de… Théodore Grenzberg.
Tout y est, l’art, la culture, le divertissement ; à chaque époque ses visionnaires et ses détracteurs, ses éclats artistiques et ses mensonges, ses succès et ses rejets… Voici une véritable ode à la liberté et au pouvoir de la création, une formidable épopée familiale dont on ne peut se détacher une fois la dernière page achevée. Sombre et éblouissant !
Catherine D.
Paru en août 2016.
Voici un bel ouvrage hybride, joliment illustré du trait fin d'Albertine, qui plaira aux amateurs d'histoires courtes et de gastronomie italienne!! A la suite d'une séparation, Philippe se rend à Lecce, dans les Pouilles, pour y retrouver la sérénité et surtout terminer son roman. C'était sans compter sur Inès, sa voisine presque nonagénaire qu'il rencontrera avant même de tourner la clé de l'appartement dans lequel il s'apprête à vivre durant une année entière! Elle lui apportera de bons petits plats et l'aventure culinaire pourra commencer, mâtinée d'une complicité vive et tendre entre ces deux amis animés d'une même gourmandise. L'année écoulée, les recettes seront consignées et détaillées pour notre plus grand bonheur : Orecchiette con le cime di rapa, Pasta coi peperoni, Carciofi e patate, Parmigiana di melanzane, autant de soleil et de bonheur à faire entrer dans nos cuisines!
Catherine D.
Paru en mars 2017.
En 1893, Johanne Lien, jeune cueilleuse de fruits de la bourgade norvégienne Åsgardstrånd, amie d'Eduard Munch qui lui permet de peindre en cachette et avec lequel les conversations se font poèmes et restent bien souvent suspendues hors du temps, se retrouve le temps d'un été au service d'une grande famille bourgeoise en villégiature dans la ville voisine. Elle deviendra peu à peu la confidente, amie et complice d'une des filles de l'Amiral, Tullik. Et celle-ci va l'entraîner à sa suite dans un tourbillon de sentiments dévorants, causés entre autres par la passion que cette dernière va vivre avec le peintre honni par toute la communauté locale, Eduard Munch. Outre ces trois personnages principaux, il s'agit ici d'une véritable ode à la peinture qui devient un personnage à part entière de cette histoire où tous les sens sont en éveil. L'auteure parvient en effet à nous faire ressentir la chaleur de cet été caniculaire, la transpiration causée par ces heures de danse au bal du Grand Hôtel, entendre le souffle puissant du vent et de la tempête qui fait rage en cette nuit de perdition, sans parler des émotions causées par les traits picturaux subtilement mis en mots pour décrire les célèbres toiles du maître. Chaque chapitre est une couleur et est introduit par une citation du Traité des couleurs de Goethe, que la jeune servante a reçu en cadeau par Munch.
Voici un premier roman sensible et très bien écrit, en forme d'hommage à la force créatrice en général, à la peinture de Munch en particulier. Intense et délicat!
Catherine D.
Paru en mars 2017, traduit de l'anglais (Royaume-Uni) par Séverine Beau. Existe aussi en format numérique.
New York, fin des années '80, début des années '90. Necro et son frère Ill Bill, Jewish Jane (J. J.) et Ethan Horowitz sont les "héros" de cette non-fiction. Ils sont blancs, juifs et pauvres, dealent de la dope, volent des bagnoles ou des fringues Ralph Lauren et tentent de se faire respecter un flingue à la main... Ici, c'est leur histoire qui nous est racontée pour la première fois, sans édulcorant et bien avant l'arrivée de Giuliani à la tête de la cité avec son arme fatale, la "tolérance zéro". On découvre une ville tentaculaire qui n'existe - presque - plus, où la peur est omniprésente et poétique, où le rap et le cinéma peuvent sauver des vies, où la violence de la rue n'est pas une théorie, mais bien une réalité de chaque instant et où les flics commettent des bavures, trop sûrs d'eux et du pouvoir qu'ils détiennent sur ces gamins déclassés. Leurs vies d'adolescents blancs et juifs dans ces quartiers ghettos où les Portoricains et les Noirs sont les maîtres du jeu nous sont livrées sans concessions, où d'entrée de jeu, le futur est un espace inaccessible, la prison un passage obligé et l'université, une perspective inexistante. Ils s'en sortiront, mais à quel prix...
Karim Madani, journaliste français spécialisé dans les cultures urbaines, auquel ils vont se confier, avec toute la force de leurs vies brisées, démontre s'il le fallait encore que la réalité ne cesse de dépasser la fiction. C'est beau, c'est violent, c'est une bombe que vous tenez entre vos mains.
Les éditions Marchialy, dont on aime beaucoup le travail éditorial et le soin apporté à chacun de leurs ouvrages, frappent une nouvelle fois fort, très fort!!
Catherine D.
Paru en février 2017. Existe aussi en format numérique.
Alors que notre pays connaît des épisodes de plus en plus fréquents de pollution de l'air, Alexis Zimmer revient sur les brouillards toxiques qui ont sévi début 1930 dans le bassin liégeois ainsi que tout ce qui en a été dit, écrit et débattu (par les pouvoirs publics, industries, scientifiques, riverains,..). Un ouvrage historique complet et passionnant, notamment sur les conditions qui ont participé à la création et au développement de ce bassin, mais qui nous montre plus largement que malgré toutes les connaissances acquises nous ne parvenons toujours pas aujourd'hui à "appréhender les phénomène de pollutions de l'air de manière à pouvoir annihiler à long terme les dégâts sanitaires qu'ils causent". Lecture hautement recommandée et plus que jamais d'actualité!
Gregory R.
Paru en novembre 2016
Dans son sixième roman, Roopa Farooki reprend ses thèmes chers, la famille, les liens entre l'Orient et l'Occident, et nous ravit une fois de plus par sa finesse psychologique, la fraicheur de son ton, la vivacité de sa langue.
Elle nous entraîne dans un récit dense, éclaté, entre L'Inde traditionnelle, Londres et les USA, depuis 1940 jusqu'à nos jours, à la suite de ses quatre personnages principaux, deux frères et deux soeurs, plus ou moins marqués par une enfance douloureuse sous l'emprise d'une mère autoritaire et manipulatrice. A l'âge adulte, quasi tous les membres de la fratrie se sont éloignés de la figure maternelle mais resteront-ils hantés par leur passé ? Arriveront-ils à se construire en tant qu'adultes, amants, époux, pères ou mères ?
L'auteure ancre son récit dans un monde en pleine mutation, à mi-chemin entre l'Orient traditionnel et l'Occident moderne, aborde sans tabou et beaucoup de justesse les sujets de l'immigration, des mères célibataires ou de l'homosexualité.
Avec patience et amour, Roopa Farooki tisse les liens, souvent distendus, entre ces personnages, et nous donne à suivre ces quatre trajectoires qui ont traversé les cultures, les frontières et les décennies, avec plus ou moins de force ou de fragilité.
Voici sans conteste un roman attachant.
Delphine
Paru en février 2017. Existe également au format numérique.
Dans une librairie, tous les sujets des sciences humaines se côtoient et quand tout vous intéresse, cela peut donner le tournis ! Pour faire une chose à la fois, cette semaine, petite plongée dans la rayon psychologie, avec pour angle d'attaque la psychiatrie.
Quatre titres récemment parus sont chroniqués ci-dessous. Mais par ailleurs, un livre en évoquant un autre, je n'ai pu m'empêcher de repenser au merveilleux La femme qui tremble de la romancière Siri Hustvedt, paru chez Actes Sud en 2010 (en format poche Babel depuis 2013). Siri Hustvedt, à partir d'un épisode personnel troublant du point de vue de la santé mentale, s'y plongeait dans une recherche passionnante et passionnée sur la santé mentale et la psychiatrie qui la définit et la soigne (ou tente, dans les meilleurs cas, de le faire). A épingler aussi, La santé mentale, de Mathieu Bellahsen aux éditions la Fabrique, qui invite à la vigilance face aux dérives productivistes, gestionnaires, normalisatrices en pscyhiatrie (paru en 2014).
Ce livre soutenu mais très clair, didactique et surtout passionnant, retrace l'histoire des idées bizarres qui ont marqué la psychiatrie, y compris pendant les nombreux siècles où elle ne portait pas encore ce nom.
Boris Cyrulnik commence par brosser, dans une introduction brillante par sa lisibilité, un panorama de l'histoire de la discipline - tour de force en quelques pages. Il y rappelle à quel point la définition mouvante et culturelle de la normalité marque fortement, voire définit, la pratique du psychiatre, de même que sa propre vie psychique qui va déterminer sa façon d'aborder le patient et d'interpréter ses comportements, ses paroles, son trouble.
A épingler dans cette introduction : le danger des dogmes et des catégories trop fermées, auxquels Cyrulnik préfère une pratique à la fois scientifique et artisanale, toujours prudente et en recherche.
Suivent des articles de différents contributeurs et une contributrice psychiatres avec différents focus : les supplices imposés aux soldats revenus traumatisés de la Grande guerre pour les renvoyer au combat ; l'évolution des diagnostics d'alcoolisme et des représentations dominantes en matière de consommation d'alcool ; etc.
Passionnant d'un point de vue historique, sociologique et tout simplement humain.
Toujours chez Odile Jacob mais dans un autre registre, voici un livre qui tente, sur le mode du récit romancé, de nous faire découvrir le métier de neuropsychiatre qui, comme l'auteur aime à le rappeler, cumule la neurologie et la psychiatrie. Le récit accroche et rend bien digeste la découverte du métier et d'une des façons de le pratiquer.
Ce livre fait partie, comme le suivant, d'une collection dédiée aux pratiques, au terrain et à la prise de recul sur ces pratiques : il intéressera donc les intervenants en psychiatrie mais aussi tout un chacun, notamment grâce à toute sa première partie, composée d'un long récit fictif inspiré de faits réels, qui nous met dans la peau du patient. Édifiant. La seconde partie décode et extrait des recommandations.
Chez le même éditeur, ce titre témoigne et trace le chemin pour les animateurs d'ateliers d'écriture en psychiatrie. Balises et démarches concrètes alternent et se complètent pour une lecture très pratique, où on puisera et reviendra.
Natacha
L'histoire du Hip Hop en BD, c'est enfin une réalité et c'est magnifiquement réussi. Quasi exclusivement consacrée à la naissance du mouvement hip hop dans sa dimension musicale, ce comic book remet en perspective le foisonnement des années 70 dans le Bronx, avec Afrika Bombaataa, le Sugarhill Gang, Grandmaster Flash pour n'en citer que quelques-uns. On y croise aussi Jean-Michel Basquiat ou Keith Haring et même si les références sont parfois complexes à déchiffrer, tant ce mouvement a connu une multitude de représentants, on ne peut s'empêcher de fredonner et de se repasser en boucle le succès "Rapper's Delight"! Un album qui donne la pêche!!
Catherine D.
Paru en septembre 2016.
Sur l'île de Java, dans les Indes néerlandaises, à la fin du 19ème siècle, vit Minke, notre héros, un jeune indigène, élève brillant d'une école européenne. Nous sommes à Surabaya, dans une société hyper hiérarchisée. Minke, journaliste à ses heures, croise la route de Nyai Ontosoroh, une femme hors du commun, concubine d'un riche fermier et industriel hollandais, Herman Mellema. Elle gère seule la "Boerderij Buitenzorg", une ferme prospère, depuis que Herman est devenu fou. Minke tombe follement amoureux de la belle et fragile Annelies, fille de Nyai. L'attention que lui portent les deux femmes, attire sur lui bien des jalousies.
Mais au-delà de l'histoire aventureuse et romanesque, le thème principal du récit est la question du colonialisme. Nyai et Minke sont tous deux javanais, intelligents et idéalistes. Ils rêvent d'une liberté conquise contre un régime de discrimination. Minke, dont l'esprit critique est aiguisé par l'excellente professeure Magda Peters, veut être un homme libre "qui n'obéit ni ne donne d'ordre à personne". Car Minke, dans son coeur et dans sa chair, est javanais. Fils d'un bupati, il honnit la servilité, les rituels et la dépendance de son peuple face aux européens, comme il déteste l'autorité et la supériorité de ces derniers.
Pramoedya Ananta Toer (1925-2006) est une figure marquante de la littérature indonésienne. Il prit part à la lutte pour l'indépendance de son pays et fût incarcéré de nombreuses fois, dont 15 ans passé au bagne sur l’île de Buru, le goulag des mers du Sud, de 1965 à 1979.
"Le monde des hommes" est le premier tome d'une tétralogie intitulée "Buru quartet". On se réjouit déjà de retrouver ces personnages forts et attachants dans le second volet qui paraîtra en mars, toujours aux éditions Zulma.
Véronique
Paru en janvier 2017.
En sept questions et tout autant de chapitres, voici d'intéressantes pistes de réflexion autour de cette idée originale, mais pas si récente, qu'est le revenu de base ou allocation universelle. Autant défendu par les libéraux que par les socialistes ou autres écologistes et altermondialistes, ce concept difficile à appréhender (utopie? pistes de financement?...) n'est pas dénué d'ambiguïté et les auteurs permettent justement d'affiner notre propre réflexion sur le sujet à travers leur état des lieux. Une nouvelle civilisation serait-elle en marche, qui ne serait plus basée sur la valeur travail et la rémunération? Une lecture pertinente et chaudement recommandée!
Catherine D.
Paru en janvier 2017. Existe aussi en format numérique.
Quelle écriture, quelle justesse, quelle fin. Voici un livre qui nous raconte l'histoire de Martial Kermeur, un homme simple qui vient pourtant d'avoir jeté à la mer Antoine Lazenec. Qui est Martial? Pourquoi en est-il arrivé là? Quel va-t-être son sort désormais, maintenant que le corps sans vie de Lazenec a été repêché?
Dans ce septième roman, Tanguy Viel allie avec brio la forme et le fond. La plume est magnifique, belle, tout en étant très juste et digne par rapport au personnage de Martial; le fond est actuel, nécessaire. Qui sont les grands voleurs de notre époque? Antoine Lazenec, la victime, est un promoteur immobilier qui arrive au Finistère avec un projet mégalo qui pourrait bien transformer totalement l'avenir d'une petite bourgade maritime. Pourtant les choses ne vont pas se dérouler comme prévu.
Dans le bureau du juge où se situe l'ensemble du roman, Kermeur va raconter les faits, c'est ce qu'on lui demande. Avec humilité, il revient sur l'histoire de sa rencontre avec Lazenec et sur leur relation durant plusieurs années.
Quel magnifique roman! Une lecture qu'on vous recommande vivement.
Catherine
Paru en janvier 2017. Existe aussi en format numérique.
Tommi Kinnunen nous plonge dans l’histoire d’une famille au cœur de la taïga, au nord de la Finlande, et nous laisse entrevoir ses secrets bien gardés, que le lecteur découvrira peu à peu, à travers la voix de quatre protagonistes : Maria, la matriarche indépendante, Lahja, sa fille, Onni, son gendre, et Kaarina, sa belle-petite fille.
Si la recette du roman polyphonique n’est pas neuve, l’auteur parvient à donner de la consistance à tous ses personnages et à insuffler une âme à ce livre. Il nous livre un récit intimiste, crée une véritable ambiance feutrée et tisse surtout une intrigue dense qu’on ne lâche pas et qui se lit comme une saga.
Ce roman nous invite à un voyage dans la Finlande du XXe siècle, entre 1895 et 1996 : un pays dont nous connaissons finalement peu l’histoire et que nous découvrons avec curiosité, loin des clichés.
Un texte très beau, fluide, premier roman élu à sa sortie en Finlande meilleur livre par le Finnish Grand Journalism Prize.
Certainement une belle découverte.
Delphine
Paru en janvier 2017, traduit du finnois par Claire Saint-Germain, existe aussi au format numérique.
Quel roman! Apprenant qu'il avait été plébiscité par Barack Obama comme une des lectures les plus marquantes de son mandat, je me suis penchée sur ce livre avec curiosité et j'ai été happée.
Construite en deux parties, l'histoire débute dans la famille de Lotto en Floride. Lancelot, dit Lotto, est le riche héritier d'un couple qui a fait fortune dans l'industrie de l'eau en bouteille. A 17 ans, il est envoyé dans le New Hampshire pour faire ses études et surtout, être éloigné de mauvaises fréquentations où la drogue et l'alcool coulent à flot. A 22 ans, il rencontre Mathilde qu'il épouse contre l'avis de sa mère. Débute alors une histoire d'amour aussi passionnelle et fusionnelle que mensongère. Durant les 200 premières pages du roman, on découvre l'enfance de cet homme, on le suit dans son histoire de couple et dans sa carrière professionnelle.
A la moitié du roman, on plonge dans l'histoire de Mathilde. Née en France, dotée alors du prénom Aurélie, elle débarque aux USA à 12 ans. L'auteur revient sur les évènements déjà racontés dans la première partie du roman mais en proposant un autre regard, celui de cette femme mystérieuse, l'épouse parfaite de Lotto. On va de rebondissements en rebondissements. Qui est vraiment Mathilde? Pourquoi a-t-elle épousé Lotto? Quels sont les mystères qui entourent sa vie avant Lotto?
Lauren Groff dresse un portrait de l’Amérique avec ses clichés et ses excès. Elle nous montre combien les relations sont complexes et pleines de faux-semblants. Dans "Les Furies" les fêtes sont orgiaques, l'amour est passion, les succès sont énormes et les échecs d'autant plus durs. Tout semble excessif et quelques mots suffisent pour briser l'image parfaite construite par chacun des personnages et provoquer la chute de ceux-ci. Une lecture surprenante, un roman qu'on dévore.
Catherine
Paru en janvier 2017, traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Carine Chichereau. Existe aussi en format numérique.
Vera Sigall, romancière à l'aura puissante, 83 ans, fait une chute qui la laisse inconsciente. Son ami et voisin Daniel, qui a plusieurs décennies de moins et avait construit avec elle une complicité solide et particulière, veille à son chevet à l'hôpital. Ce qui va mettre sur son chemin la toute jeune Emilia, étudiante fascinée par l'oeuvre de Sigall et atteinte d'un mal étrange : elle ne supporte aucun contact physique. Ensemble, ils vont découvrir l'histoire de Vera mais aussi celle du poète Horacio Infante, son illustre contemporain, et ce qui les lie tous les deux.
Ce livre est empreint d'une grande poésie dans sa façon d'observer le désir, l'envie, l'écriture, les créateurs, la filiation aussi. Qu'il s'agisse de la passion empreinte de rivalité qui lie Horacio à Vera, de l'étrange relation platonique d'Emilia avec son fiancé resté en France, de la curieuse rencontre de Daniel avec Emilia, de la déliquescence du couple que Daniel forme avec Gracia, la romancière suit le fil du désir avec une curiosité d'entomologiste et une belle plume. Elle accompagne aussi ses personnages en proie aux affres et bonheurs de la création, qu'il s'agisse de trouver le mot juste, de trouver de la reconnaissance ou encore de faire aboutir le plan d'un bâtiment rêvé (pour Daniel l'architecte).
La fin nous offre une révélation vers laquelle tout converge. Un très beau roman.
Natacha
Paru en janvier 2017, traduit de l'espagnol (Chili) par Claude Bleton. Existe aussi en format numérique.