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Robin Mac Arthur, auteure et chanteuse américaine, signe un magnifique recueil de nouvelles qui nous plonge dans l’Amérique rurale.
Les personnages dépeints vivent au plus proche de la nature, par choix parfois, souvent par nécessité, car la vie ne leur a pas donné autre chose. On les découvre dans leur quotidien, au bord d'une forêt, dans les champs et les rivières du Vermont. L'auteur ne nous dévoile qu'un petit coin de leurs vies, un fragment qui nous donne à chaque fois l'envie de poursuivre la route avec les femmes, les hommes, les familles présentés dans ces nouvelles.
On sent la roche, la lumière du soir, l'eau glacée des lacs, l'odeur des champs coupés dans les mots de Robin Mac Arthur. On perçoit la mélancolie, la solitude, l’âpreté de la vie sauvage, mais aussi la liberté que cette existence marginale et loin des villes permet. Chaque nouvelle est un mystère qui nous laisse rêveur sur le devenir des êtres rencontrés. Seront-ils couper les liens qui les tiennent attacher au Vermont ? Seront-ils plus heureux ailleurs? L'exil vaut-il mieux que les racines?
Catherine M
Paru en mai 2017. Traduit de l'américain par France Camus-Pichon. Existe aussi en format numérique.
Dans ce premier roman aussi beau que cruel, nous partons à la rencontre d'un jeune enfant/adolescent en route vers l'âge adulte. Il nous raconte son quotidien dans une région éloignée de la modernité et de la frénésie de notre monde moderne et urbain. Il nous parle de la misère et de la violence de ces zones rurales où l'alcool coule à flot, où les mots manquent aux hommes pour exprimer leurs doutes, leurs peurs, leurs joies, et ce sont les regards, mais aussi les coups, qui prennent le relais.
Dans la première partie du livre, le narrateur évolue dans le microcosme familial de son village natal, il est à la fois libre comme un enfant laissé à lui-même et terriblement contraint par un entourage oppressant qui ne voit d'autre avenir possible que la reproduction d'une vie de misère. On apprend à tuer le mouton d'un coup de couteau sec et vif, car c'est ce qu'on fera adulte. Dans un second temps, on suivra le jeune homme qui part à la rencontre de son destin, seul, dans un ailleurs. La ville pourra-t-il l’accueillir? La solitude, voire le rejet, n'est-il pas encore plus difficile à vivre dans une ville surpeuplée de gens sans racine?
Ce récit sombre, glauque nous colle à la peau tant la langue de ce jeune romancier est belle, brillante. On retrouve l'ambiance de Steinbeck par moments. C'est une lecture qui marque, un texte qui sort de l'ordinaire (comme beaucoup de textes édités par la géniale maison d'édition Allia). Un auteur à suivre, assurément.
Catherine
Paru en janvier 2017, existe aussi en format numérique.
Jessie Burton est habile pour tisser les liens entre les époques et les personnages et nous plonger dans des atmosphères envoûtantes. Elle entraîne le lecteur dans un récit dense construit entre deux époques et deux endroits différents : Londres en 1967 et Malaga en 1936.
Le roman débute à Londres en 1967. Odelle, débarquée depuis quelques années de ses Caraïbes natales, décroche un poste de secrétaire dans une galerie d'art. Elle y rencontre l'énigmatique Marjorie Quick, sa patronne et fait la connaissance de Lawrie, un jeune Londonien dont elle tombe amoureuse. Ce dernier a hérité de sa mère un tableau remarquable au titre énigmatique "Les filles au lion". Une oeuvre incontestablement unique, en avance sur les codes graphiques de son temps, dégageant une aura puissante. Un tableau surtout auréolé de mystère puisque lorsqu'il réapparaît en 1967, après trente ans d'oubli, on a des doutes sur les circonstances de sa création et sur l'identité du peintre qui en est l'auteur. Néanmoins, la galerie d'art pense qu'il s'agit d'une oeuvre peinte en 1936 en Andalousie par Isaac Roblès, un prometteur peintre mort trop jeune, pendant la guerre civile espagnole. Et Marjorie Quick, de son côté, semble fortement troublée par le tableau... Odelle décide de mener son enquête et va faire ressurgir du passé la vérité.
Jessie Burton entrecroise le récit de la quête d'Odelle avec celui des origines de cette peinture en 1936. On y découvre le destin d'Isaac Roblès, jeune révolutionnaire passionné, de sa soeur Teresa, et d'Olive Schlöss, jeune anglaise qui passe quelques mois en villégiature en Andalousie avec ses parents. Des liens se tissent entre ces personnages, des passions se nouent... Olive et Isaac aiment peindre et le climat est propice à la création. Mais la guerre civile est aux portes du petit village andalou...
Après "Miniaturiste" son précédent roman, Jessie Burton signe à nouveau un roman passionnant servi par une très belle plume, qui nous apprend beaucoup sur l'histoire de l'Espagne et l'histoire de l'art.
Delphine
Paru en mars 2017, traduit de l'anglais par Jean Esch, existe aussi au format numérique.
Avec délicatesse, Grégory Mardon nous invite à suivre Achille, ce personnage un peu perdu depuis que la femme qu'il aimait a voulu rompre. Plonger dans ses pensées, forcément un peu torturées. Voyager avec lui, sur les routes de France, dans un voyage qu'il espère libérateur.
Le récit débute quand Achille devient propriétaire d'un appartement en région parisienne. En plein travaux de rénovation, il tombe par hasard sur une lettre coincée entre le plancher et le revêtement de sol. Le courrier date de 1976, est adressé à Suzanne, l'ancienne propriétaire des lieux, décédée depuis. Une lettre d'amour, probablement jamais lue... Achille a besoin de se changer les idées et décide sur un coup de tête de ramener la lettre à son expéditeur à Marseille. Par les chemins de traverse à travers les campagnes françaises, il descend de Paris vers Marseille, en scooter. Retrouvera-t-il Tristan, l'amoureux malheureux de 1976 ? Parviendra-t-il surtout à retrouver une forme de paix intérieure, à oublier ?
Grégory Mardon, toujours aussi talentueux, nous touche avec ce roman graphique beau et subtil. Le dessin et le texte nous emportent, nous plongeons avec plaisir dans ces décors champêtres aux couleurs chaudes. Un très heureux moment de lecture !
Delphine
Paru en mai 2017
Objet littéraire non identifié, artistique et décalé, cette chronique de deux familles américaines sera fragmentée selon le principe de l’abécédaire et reconstruite au gré de vos envies, dans une chronologie éclatée qui, pourtant, n’empêche nullement la compréhension de l’histoire… La présentation est particulièrement soignée, avec la participation d’une quarantaine de photographes différents. Une lecture unique à savourer !
Catherine D.
Paru en avril 2017.
Gros coup de cœur que ce livre de cuisine végétale!
L'auteure, française vivant en Italie depuis plus de dix ans, propose plus de 350 recettes pour la vie de tous les jours, faciles à réaliser, et souvent avec un délicieux twist méditerranéen. On y retrouve donc moult déclinaisons de pâtes, bruschette et pizze, mais pas que: viandes végétales, desserts, salades, cuisine du monde et même boulangerie sont également au rendez-vous, le tout 100% végétalien. Ici, pas d'ingrédients impossible à trouver, les fruits et légumes frais sont mis à l'honneur et le reste est tout à fait accessible.
Cet ouvrage est une véritable source d'inspiration pour les repas du quotidien, avec des idées qui conviendront aussi bien pour les soirs de fête! Seul petit bémol pour ceux qui mangent avec les yeux: il ne comporte pas beaucoup de photos, mais on vous promet que les recettes présentées n'exigent pas de guide visuel :-)
Hélène
€19,95, paru aux éditions La Plage en mai 2017.
Anjali, jeune épouse d'un mari volage et inconséquent, va subir intimement et socialement les conséquences terribles de l'explosion d'une usine de gaz à Bhopal en Inde, alors qu'elle attendait son mari qui n'est jamais venu la rechercher à la gare... Elevée dans la tradition, elle réalisera son rêve de jeune fille en obtenant un mariage fastueux, avant de devoir s'émanciper et briser les tabous de la société indienne pour faire face à la tragédie qui la frappe et s'élever contre sa culture, sa famille et ses propres croyances. Elle divorcera, déménagera loin des siens, reprendra des études supérieures durant lesquelles elle rencontrera un homme qu'elle aime et qui l'aime. Ils se marieront, elle deviendra enseignante et élèvera leur fils, lourdement handicapé à cause des gaz qu'elle a inhalés des années auparavant, lors de cette funeste nuit...
Voici un très beau premier roman d'une auteure indienne exilée aux Etats-Unis et qui vit maintenant au Danemark, basé sur un fait réel ayant marqué l'histoire de l'Inde, un des plus graves accidents chimiques du 20ème siècle.
Catherine D.
Paru en janvier 2017, existe aussi en format numérique.
Décrire cinq années de la vie de ce monstre sacré du cinéma français qu'est Gérard Depardieu était un projet ambitieux. Mais Mathieu Sapin n'a vraisemblablement pas froid aux yeux car il s'est lancé dans l'aventure avec enthousiasme et a passé beaucoup de son temps à suivre le comédien sur ses tournages, entre 2012 et 2016. Une expérience sans doute pas de tout repos... Carnet de croquis à la main, il l'a accompagné à travers le monde et a croqué son quotidien avec humour mais aussi pas mal de respect pour l'homme. Il faut dire que dans cet album de BD-reportage, on découvre un Gérard Depardieu sans doute plus vrai que nature, un homme au caractère entier, à la fois insupportable et attachant, qui semble dévorer la vie à pleines dents. Si Mathieu Sapin est resté dans l'ombre du comédien, il n'en a pas moins partagé certaines aventures, formant parfois un duo improbable mais touchant avec Gérard Depardieu : gentil petit Sapin et grand méchant Depardieu. On ne peut que savourer certaines scènes décrites dans l'album, notamment celle où Mathieu Sapin accompagne Gérard et son équipe dans le sauna brûlant d'un haut gradé russe, épreuve d'autant plus éprouvante qu'ils avaient dû accepter "quelques" vodkas pour faire honneur à leur hôte avant de rejoindre le sauna...
Bref, le récit est rythmé et vraiment détonnant par moment, mais on sent que les liens tissés entre les deux hommes au fil de ces cinq années sont sincères et respectueux.
Un roman graphique étonnant à découvrir sans hésiter, qu'on aime ou pas le grand Gérard Depardieu ! Réjouissant !
Delphine
Paru en mars 2017.
Isadora Duncan, figure mythique de la danse du début du XXe siècle, prend vie dans cette bande dessinée passionnante. Le lecteur est happé par ce récit virevoltant, assez virtuose, qui traverse les décennies et les continents, sur les traces de cette Isadora, terriblement libre et attachante. On découvre des décors vivants des grandes villes au début du XXe siècle (Paris, Londres, Berlin, Moscou, New York...), des personnages qui ont marqué l'histoire de l'art (comme ce Rodin par exemple dont le travail subjugua Isadora). La vie tumultueuse de la danseuse est captivante, on sent qu'Isadora est portée par un élan, une fougue, une envie de vivre qui fait peu de cas des qu'en-dira-t-on : elle dansait presque nue sur toutes les grandes scènes, improvisant des danses très spontanées, presque mystiques, proches de l'esprit de l'Antiquité. Une liberté d'expression qui lui valut la gloire et la notoriété mais qui faisait aussi crier au scandale. Cette même liberté marqua sa vie amoureuse, ses relations avec sa famille, son rapport au monde et à la vie. Car Isadora Duncan était une femme forte et indépendante, jusqu'à la fin de sa vie, qui se clôt de manière tragique.
Le duo formé par Julie Birmant au scénario et Clément Oubrerie au dessin n'en est pas à son coup d'essai, puisqu'ils avaient déjà signé ensemble la tétralogie "Pablo", consacrée à Pablo Picasso. Ils se sont attaqués cette fois, et avec le même talent, à une autre légende, et à une personnalité solaire qui ne laisse personne indifférent. Le scénario est bien ficelé, la narration enlevée, le dessin très expressif. Bref, une belle réussite !
Delphine
Paru en avril 2017.
Michaël Olbrechts nous plonge, le temps d'un week-end, dans l'intimité d'une famille comme les autres, réunie autour de Pépé Louis. Son épouse a en effet décidé de rassembler tous ses proches pour "fêter" le dernier jour de Louis à la maison, avant qu'il ne parte en maison de repos. Car depuis sa crise d'apoplexie quelques mois plus tôt, l'octogénaire n'est plus que l'ombre de lui-même et son épouse a dû se résigner à le placer. Mais la réunion de famille s'avérera plus tumultueuse que prévu, et fera resurgir de vieilles tensions... Mais aussi de vieux souvenirs empreints de nostalgie.
Caustique chronique sociale relevée par un dessin presque caricatural, ce roman graphique décrit aussi très justement les relations entre les personnages, les émotions sous-jacentes et dépeint avec tendresse l'histoire de cette famille, depuis 44 ans, jusqu'à l'évocation de cet énigmatique Ronny... Le dessin restitue aussi avec un certain charme les ambiances de ce petit village de province sous la chaleur estivale. Voici un album doux-amer qui se lit avec plaisir.
Delphine
Paru en mars 2017.
Décalé et saupoudré de touches d’humour, ce nouveau livre consacré à la fermentation se veut accessible au plus grand nombre, malgré sa technicité. Avec David et Seb, vous saurez tout sur les principes et bienfaits de la fermentation, tandis que votre garde-manger va progressivement accueillir de jolis et goûteux bocaux colorés ! 70 recettes pour apprendre à faire du kimchi, des citrons confits, du kéfir d’eau, du kombucha, de la bière, etc., et enfin, à intégrer toutes ces préparations dans des plats qui vont se transformer en moments de dégustation savoureux et inoubliables !! Pour chaque préparation, le niveau de difficulté, le type et le temps de fermentation ainsi que l’équipement nécessaire sont indiqués, le tout de façon ludique et richement illustrée !
Catherine D.
On ne présente plus Eric Fréchon, chef triplement étoilé, Meilleur Ouvrier de France (1993) et Chevalier de la Légion d’Honneur (2008)! Celui-ci nous livre ici son « livre manifeste », illustré des superbes photographies de Benoit Linero, dont l’entrée en matière est constituée de son « Cadre de création » rédigé à la veille d’obtenir sa troisième étoile. C’est pour lui l’assurance de garder son intégrité à l’aide de 13 principes qui touchent aussi bien à l’inspiration, la technique, le choix des produits, le confort du client… Cette autodiscipline qui se joue des codes se retrouve dans les recettes proposées ici, toutes empreintes de précision et de technique, pour le plus grand plaisir des saveurs ainsi sublimées : l’incontournable Macaronis farcis de truffe noire, artichaut et foie gras de canard, gratinés au vieux parmesan; Canard sauvage rôti aux figues et dragées, purée d’oignons à la verveine, cuisse confite ou encore Pépites des tropiques, noix de pécan caramélisées, crème glacée à la vanille, jus de passiflore au poivre. Un très beau livre !
Catherine D.
Voici un ouvrage qui intéressera tous ceux qui souhaitent tenter l’aventure d’une transition de leurs habitudes alimentaires vers une alimentation plus saine et plus naturelle, que ce soit pour des raisons écologiques, éthiques ou de bien-être. Sans pour autant se passer totalement de viande, les auteurs établissent la liste des principaux produits utilisés dans les régimes végétarien, végétalien ou encore sans gluten, tout en étant attentif à la production locale, bio et de saison! En plus de proposer 150 recettes réparties en 6 catégories (petit-déjeuner, apéro, salades et soupes, plats, desserts, goûters), les auteures s’emploient à détailler les bienfaits nutritionnels et les conditions d’utilisation de chaque produit alternatif, comme les substituts de la viande, les laits et crèmes végétaux, les pâtes sans gluten, les sucres naturels, les graines, les super-aliments, etc. Alternatif et séduisant!
Catherine D.
Deuxième volet d'une trilogie, faisant suite à "D'ailleurs les poissons n'ont pas de pieds", "A la mesure de l'univers" est un magnifique roman qui nous transporte en Islande. On voyage dans trois époques, les années 30 où la pêche semble organiser toute la vie de l'île, les années d'après-guerre avec la présence de l'armée américaine par la biais d'une importante base militaire qui pèse sur tout le pays, et l'époque actuelle où l'on retrouve notamment certains personnages qui se sont "échappés" de l'île pour vivre une vie loin de la pêche et du microcosme islandais. On sent que ce pays, où les étés sont clairs et les hivers une sorte de longue pénombre, est particulier de par sa position géographique, de par son histoire, de par sa proximité avec un océan tout à la fois paisible et déchaîné.
Rempli de poésie, d'émotions, d'amour, ce livre est un non seulement une magnifique histoire de famille et de transmission mais aussi une ode à la littérature tant la langue utilisée est belle, juste. On ne compte plus les phrases qu'on a envie d'épingler au cours de la lecture.
Cette lecture est une des plus belles que j'ai faites cette année et je suis rentrée sans problème dans le roman bien que je n'ai pas lu le premier volet de cette histoire (qui est, cela dit, magnifique aussi parait-il, et disponible en poche chez Folio).
Voici un auteur à découvrir sans hésiter.
Catherine M
Paru en avril 2017, traduit de l'islandais par Eric Boury. Existe aussi en format numérique.

Le titre de ce roman lui va comme un gant et rend bien compte du talent de Gornick à dresser le portrait de sa mère et d'elle-même, prises dans une relation qui les enserre l'une et l'autre dans une toile d'araignée passionnée. Vivian Gornick est journaliste et essayiste, elle évoque sa propre histoire dans ce livre et cela se passe à New York, notamment dans le Bronx où les Juifs, les Irlandais, les Italiens se côtoient au sein des mêmes immeubles et quartiers.
Enfant et adolescente, Vivian est entourée de femmes au milieu desquelles sa mère tient les rênes, bien campée sur un mélange de convictions communistes et d'échappatoire romantique, puis bientôt veuve et entoilée dans son deuil. Mais il y a aussi Nettie, séductrice et sensuelle, Mrs. Kerner qui a perdu les pédales et bien d'autres qui jalonnent le parcours de la jeune fille et qu'elle observe avec une acuité merveilleuse.
Attachement féroce fait partie des romans qui aident à vivre en mettant des mots d'une grande justesse et d'une grande beauté sur nos labyrinthes parfois obscurs. Il est aussi jubilatoire dans son humour mordant !
Ce livre est paru en 1987 aux États-Unis et ceci est sa première traduction en français.
Natacha
Paru en janvier 2017. Traduit de l'anglais (États-Unis) par Laetitia Devaux. Existe aussi en format numérique.
"Partout dans le monde, des hommes et des femmes refusent la logique capitaliste et combattent les injustices. Certains de ces combats mènent à des victoires… Non seulement les alternatives existent, mais elles sont innombrables. Beaucoup sont simples, cohérentes, et pourraient être mises en œuvre dès aujourd’hui avec un peu de volonté politique."
Olivier Bonfond fait partie de ces gens que l'état du monde, (de la société, de la planète), ne décourage pas. Parce que, écrit-il, les solutions existent : il en énumère deux cents, certaines d'entre elles étant déjà mises en œuvre un peu partout. Pourquoi tuer TINA, « There is no alternative », l'expression fameuse de Margaret Thatcher ? Parce que cette affirmation est parfaitement mensongère, même si la propagande de nombreux « experts » prétend le contraire.
Il existe au moins trois bonnes raisons de lire ce livre : D'abord, on peut l'ouvrir à n'importe quelle page, (faites l'expérience!), on y trouve au moins une bonne idée et deux précieuses informations ; ou l'inverse. Ensuite, il (ré)concilie les amoureux du film « Demain » et les partisans du « Grand Soir », (un exercice un peu acrobatique) : le lien entre les deux démarches étant la mobilisation citoyenne. Enfin, et bien que l'auteur s'en défende, ses deux cents propositions pourraient être le programme d'un gouvernement d'unité populaire : un Podemos à la française ou à la belge, l'alternative plutôt que l'alternance. (1)
Mais Il faut tuer TINA n'est pas un énième livre d'imprécations : il ne s'attaque pas à des personnes (à l'exception de Barroso. On admettra qu'il y a de quoi…), mais à des structures, à des mécanismes d'exploitation ou d'oppression. En outre, il alterne – et c'est presque une méthode – les dénonciations (de situations inacceptables) et les motifs de se réjouir (de petites ou de grandes victoires). Quelques exemples : La multinationale Monsanto obtient l'interdiction légale, pour les paysans, d'utiliser, selon une pratique millénaire, leurs propres semences. En revanche, la Bolivie expulse du pays, après leurs multiples abus, les géants Coca-Cola et MacDo. Ou bien : la bataille de l'eau. L'accès à l'eau pour tous est de plus en plus compromis par les privatisations du secteur. Pourtant, en 2011, suite à une mobilisation citoyenne exceptionnelle et à un vrai débat démocratique, l'Italie, par referendum, vote à 95 % contre la marchandisation de l'eau. Ou encore : partout, la publicité envahit l'espace public, les médias – ces armes de distraction massive, comme dit joliment l'auteur – vendent à leurs annonceurs du temps de cerveau disponible. On estime à 500 milliards de dollars l'ensemble du budget de la publicité dans le monde ! Mais la Ville de Grenoble décide, en 2014, de bannir la publicité de ses rues, en décidant de ne pas renouveler le contrat qui la liait au groupe Decaux, qui y avait placé plus de 300 panneaux.
Certaines informations susciteront l'indignation, comme cet argument cynique du lobby du tabac qui souligne , auprès des pouvoirs publics, l'impact positif sur les finances publics de la mortalité due au tabac. (Un mort ne perçoit plus de pension!) D'autres passages provoqueront l'hilarité. En novembre 2009, la Banque mondiale décide de financer un projet au Pérou pour retarder la fonte des glaces : il s'agit de repeindre en blanc les parties brunes du glacier andin, qui absorbent plus de chaleur. Capitalisme vert … ou blanc , sauvons le climat à coups de pinceau !
Un mot, encore, sur le chapitre consacré au problème de la dette. On se rappellera qu'Olivier Bonfond s'était déjà fait connaître, en 2012 , par un livre qui examinait la légitimité de la dette publique (2). Il a également participé, à Athènes, au travail de la Commission pour la Vérité sur la dette grecque, (travail hélas enterré par Alexis Tsipras). C'est donc en connaissance de cause qu'il étudie ici les dettes publiques du Mexique comme de la Russie, de l'Argentine comme de l’Équateur, ou de ... l'Allemagne, avec les solutions différentes, souvent surprenantes, qui y ont été apportées.
Refuser de payer la dette, souligne-t-il, c'est obliger les créanciers à « sortir du bois ». Les identifier permet de les traiter différemment : un petit épargnant, une banque, une multinationale de l'assurance, ce n'est pas pareil.
Il faudrait encore mentionner les chapitres consacrés aux médias, au féminisme, aux institutions internationales, à l'agroécologie, mais puisqu'il est impossible de résumer en quelques lignes un livre aussi dense, concluons par deux réflexions.
Ce livre ne se fixe pas naïvement comme objectif d'établir le paradis sur terre. Mais, en même temps, il propose d'éviter de se limiter à des changements à la marge, qui laisseraient le système intact. Il ne s'agit pas d'être des activistes marginaux qui, de temps en temps, « font le buzz », mais de transformer un bloc social en force politique.
D'autre part, nous ne sommes pas dans un catalogue de lamentations. Au contraire, l'auteur parvient à nous convaincre que s'engager pour changer le monde ne rend ni triste, ni malheureux. La lutte est, au contraire, un facteur de joie et d'émancipation personnelles.
C'est sans doute la raison pour laquelle le site qu'Olivier Bonfond anime s'appelle « Bonnes nouvelles ».
Michel Brouyaux, ancien libraire, toujours passionné.
(1) On peut aussi, bien entendu, utiliser le livre en allant directement au sujet qui nous motive le plus : rôle de la finance ? Démocratie ? Féminisme ? Migrations ? (se reporter à la table des matières)
(2) Et si on arrêtait de payer ? Olivier Bonfond. Editions Aden, 2012.
Avec ce très bon premier tome de sa nouvelle trilogie, Arnaldur Indridason nous plonge dans une période trouble de l'Histoire de son Islande natale, l'occupation anglaise et américaine au début de la deuxième guerre mondiale. Un représentant commercial, Eyvindur, est retrouvé mort au domicile d'un autre représentant, Félix Lunden, tué d'une balle provenant d'un Colt américain et marqué d'une croix gammée sur le front avec son propre sang. C'est le début d'une enquête menée par Flovent issu de la police criminelle islandaise, secondé de Thorson, Canadien né de parents islandais et donc parfait bilingue, désigné par l'état major américain qui ne croit pas en la capacité des Islandais à résoudre cette affaire... Tour à tour, nous allons les accompagner dans la compréhension de la personnalité de la victime, ainsi que de ses proches, pour en arriver à l'intérêt que les Nazis portaient à la race nordique des Islandais et du coup, à leurs recherches anthropologiques et génétiques pour retrouver cette "race restée pure depuis les Vikings", le tout mâtiné d'espionnage et de contre-espionnage... Plus qu'un excellent roman policier, il s'agit également ici de l'exploration sociale et historique du contexte particulier de cette époque, la "Situation", qui a amené nombre de jeunes femmes à rencontrer et séduire les soldats étrangers en espérant ainsi échapper à leur destin souvent pauvre et rural.
La force d'Indridason est de retranscrire avec force et sensibilité tout ce contexte historique méconnu dans nos contrées, tandis que nous nous attachons progressivement aux personnages des deux enquêteurs, inexpérimentés mais volontaires à la recherche de la vérité. Un très bon polar, au rythme plus lent, mais à l'atmosphère dense et palpitante! On attend avec impatience le tome 2, dont le premier chapitre clôt l'ouvrage.
Catherine D.
Paru en février 2017. Existe aussi en format numérique.
Hervé Le Corre n’a pas son pareil pour nous plonger dans des univers sordides, où chaque personnage tient le cap de sa vie comme il peut, toujours à la limite d’une rupture… Roman noir, un peu social, à l’écriture tranchante et juste. Coincé dans une maison perdue de la campagne girondine, Franck, qui vient de sortir de prison, attend le retour de son frère, Fabien, parti conclure une affaire en Espagne. Entouré de sa belle-famille qui l'a recueilli, Franck ne sait comment tuer le temps autrement qu'en voulant séduire Jessica, copine de Fabien, lunatique, névrosée et toxicomane à temps partiel, ainsi qu'en participant aux petites combines de ses beaux-parents qui permettent à tout ce petit monde de vivoter. On en sait ni trop ni trop peu, juste ce qu’il faut pour avoir envie de percer les zones d’ombres dont sont entourés les protagonistes et que cesse enfin cette chaleur accablante, cette tension pesante. Frank va replonger et les évènements vont le dépasser. Lu d’une traite !
Gregory R.
Paru en janvier 2017. Existe aussi en format numérique.
Nous sommes en 2018, Bachar-Al-Assad est arrêté et va être jugé pour crime. Dans ce livre, l'auteur imagine la discussion que pourrait avoir Bachar-Al-Assad avec son avocat en vue de préparer sa défense. Est-il un monstre ? Est-il violent, sanguinaire, calculateur ? Comment peut-on comprendre cet homme qui ne désirait pas gouverner ?
Bien qu'on soit dans une fiction, l'ouvrage est fortement documenté et nous permet de découvrir la vie des Al-Assad. Le narrateur revient sur l'histoire du père de Bachar, sur la manière dont il a pris le pouvoir et gouverné, sur les relations de la Syrie avec les autres pays du Moyen-Orient depuis une demi-siècle. C'est une oeuvre très agréable à lire où on apprend beaucoup de choses sur le Moyen-Orient et sur Bachar.
Catherine M.
Paru en février 2017.
Nimrod, auteur tchadien, résidant en France, nous livre ici une histoire passionnante. Ce livre est édité dans la collection "Sur le fil" des éditions Bruno Doucey, collection qui raconte le destin de poètes qui croisent la grande histoire. Dans "L'enfant n'est pas mort", c'est une poétesse, Ingrid Joncker, que nous découvrons. Elle vit en Afrique du Sud, dans les années 60 et écrit des poèmes magnifiques, politiques, engagés, intimes qui seront malheureusement en grande partie censurés. Jeune femme blanche, elle s'insurge contre les atrocités que subit la population noire et écrit notamment un poème splendide à la mémoire d'un bébé noir tué par la police lors d'un banal contrôle d'identité.
Elle sera méprisée par sa famille et par sa propre communauté qui ne la comprend pas. Son père qu'elle tente d'éblouir toute sa vie, finira par la renier. En 1994, lorsque Nelson Mandela arrive au pouvoir, il ouvre son premier discours au parlement par le lecture d'un poème d'Ingrid Joncker et va largement contribuer à réhabiliter sa poésie. Dans le roman, on voyage entre les années 60 et la vie de la poétesse et la vie de Mandela qui découvre sa poésie en prison. C'est un texte magnifique qui nous offre une plongée dans l'Afrique du Sud et dans la milieu de la littérature sud-africaine. C'est aussi un livre terriblement intime.
Catherine M.
Paru en février 2017
Des Etats-Unis à la France en passant par Berne, Berlin et Moscou, de la télé-réalité au Bauhaus, on traverse avec ce Bal mécanique un siècle d’Histoire et de culture, de modernité et d’avant-garde, des spoliations nazies aux « purges » opérées dans ces émissions télévisuelles si convoitées pour téléspectateurs en mal de gloire éphémère.
Roman scindé en deux grandes parties faisant référence à deux périodes historiques éloignées et à la chronologie éclatée, nous sommes plongés dès la première ligne dans le tournage de l’émission de téléréalité créée par Josh Shors, qui connaît un immense succès aux Etats-Unis. Son père octogénaire, Carl, artiste-peintre renommé, alcoolique et dépressif, vit dans un petit village français et ne semble pas très proche de son fils. Lui-même est le fils de Théodore Grenzberg, grand marchand d’art du début du 20ème siècle en Allemagne, qui a préféré confier son fils à un couple d’amis en partance pour les Etats-Unis lors de la montée du nazisme. Dès lors, Carl est déraciné et ne reverra plus jamais ses parents pris dans le tourbillon de l’Histoire. Un peu par hasard, en lisant le journal, celui-ci va faire une découverte qui va bouleverser sa fin de vie et par ricochet, celle de son fils et de sa belle-fille… On amorce alors la deuxième partie du livre qui met en lumière la célèbre école artistique du Bauhaus à travers le personnage lumineux et libre de Magdalena, jeune femme indépendante des années '20, dont le parrain n’est autre que Paul Klee, grand ami de… Théodore Grenzberg.
Tout y est, l’art, la culture, le divertissement ; à chaque époque ses visionnaires et ses détracteurs, ses éclats artistiques et ses mensonges, ses succès et ses rejets… Voici une véritable ode à la liberté et au pouvoir de la création, une formidable épopée familiale dont on ne peut se détacher une fois la dernière page achevée. Sombre et éblouissant !
Catherine D.
Paru en août 2016.
Voici un bel ouvrage hybride, joliment illustré du trait fin d'Albertine, qui plaira aux amateurs d'histoires courtes et de gastronomie italienne!! A la suite d'une séparation, Philippe se rend à Lecce, dans les Pouilles, pour y retrouver la sérénité et surtout terminer son roman. C'était sans compter sur Inès, sa voisine presque nonagénaire qu'il rencontrera avant même de tourner la clé de l'appartement dans lequel il s'apprête à vivre durant une année entière! Elle lui apportera de bons petits plats et l'aventure culinaire pourra commencer, mâtinée d'une complicité vive et tendre entre ces deux amis animés d'une même gourmandise. L'année écoulée, les recettes seront consignées et détaillées pour notre plus grand bonheur : Orecchiette con le cime di rapa, Pasta coi peperoni, Carciofi e patate, Parmigiana di melanzane, autant de soleil et de bonheur à faire entrer dans nos cuisines!
Catherine D.
Paru en mars 2017.
En 1893, Johanne Lien, jeune cueilleuse de fruits de la bourgade norvégienne Åsgardstrånd, amie d'Eduard Munch qui lui permet de peindre en cachette et avec lequel les conversations se font poèmes et restent bien souvent suspendues hors du temps, se retrouve le temps d'un été au service d'une grande famille bourgeoise en villégiature dans la ville voisine. Elle deviendra peu à peu la confidente, amie et complice d'une des filles de l'Amiral, Tullik. Et celle-ci va l'entraîner à sa suite dans un tourbillon de sentiments dévorants, causés entre autres par la passion que cette dernière va vivre avec le peintre honni par toute la communauté locale, Eduard Munch. Outre ces trois personnages principaux, il s'agit ici d'une véritable ode à la peinture qui devient un personnage à part entière de cette histoire où tous les sens sont en éveil. L'auteure parvient en effet à nous faire ressentir la chaleur de cet été caniculaire, la transpiration causée par ces heures de danse au bal du Grand Hôtel, entendre le souffle puissant du vent et de la tempête qui fait rage en cette nuit de perdition, sans parler des émotions causées par les traits picturaux subtilement mis en mots pour décrire les célèbres toiles du maître. Chaque chapitre est une couleur et est introduit par une citation du Traité des couleurs de Goethe, que la jeune servante a reçu en cadeau par Munch.
Voici un premier roman sensible et très bien écrit, en forme d'hommage à la force créatrice en général, à la peinture de Munch en particulier. Intense et délicat!
Catherine D.
Paru en mars 2017, traduit de l'anglais (Royaume-Uni) par Séverine Beau. Existe aussi en format numérique.
New York, fin des années '80, début des années '90. Necro et son frère Ill Bill, Jewish Jane (J. J.) et Ethan Horowitz sont les "héros" de cette non-fiction. Ils sont blancs, juifs et pauvres, dealent de la dope, volent des bagnoles ou des fringues Ralph Lauren et tentent de se faire respecter un flingue à la main... Ici, c'est leur histoire qui nous est racontée pour la première fois, sans édulcorant et bien avant l'arrivée de Giuliani à la tête de la cité avec son arme fatale, la "tolérance zéro". On découvre une ville tentaculaire qui n'existe - presque - plus, où la peur est omniprésente et poétique, où le rap et le cinéma peuvent sauver des vies, où la violence de la rue n'est pas une théorie, mais bien une réalité de chaque instant et où les flics commettent des bavures, trop sûrs d'eux et du pouvoir qu'ils détiennent sur ces gamins déclassés. Leurs vies d'adolescents blancs et juifs dans ces quartiers ghettos où les Portoricains et les Noirs sont les maîtres du jeu nous sont livrées sans concessions, où d'entrée de jeu, le futur est un espace inaccessible, la prison un passage obligé et l'université, une perspective inexistante. Ils s'en sortiront, mais à quel prix...
Karim Madani, journaliste français spécialisé dans les cultures urbaines, auquel ils vont se confier, avec toute la force de leurs vies brisées, démontre s'il le fallait encore que la réalité ne cesse de dépasser la fiction. C'est beau, c'est violent, c'est une bombe que vous tenez entre vos mains.
Les éditions Marchialy, dont on aime beaucoup le travail éditorial et le soin apporté à chacun de leurs ouvrages, frappent une nouvelle fois fort, très fort!!
Catherine D.
Paru en février 2017. Existe aussi en format numérique.