Coup de projecteur sur René Magritte : ce peintre belge surréaliste est remis à l'honneur cette année avec une grande exposition qui se tient à Paris cet automne.
A la demande des Editions du Lombard, Vincent Zabus a scénarisé un très bel hommage au peintre, avec un oeil amusé, et a proposé à son complice depuis quelques albums, Thomas Campi, de mettre la bande dessinée en images. Un excellent choix puisque le dessin pictural de Campi colle tout à fait à l'univers de Magritte.
Cet album nous fait revisiter l'oeuvre de Magritte à travers les déboires d’un personnage de fiction, embarqué malgré lui dans l’univers du peintre.
Une bande dessinée inventive, truffée de références picturales, qui nous questionne sur la place de la fantaisie dans notre vie et qui renoue avec « l’esprit Magritte ».
Delphine
Novembre 2016
Guy Delisle n'a plus à faire ses preuves dans le domaine des BD-reportages. Dans ce nouveau roman graphique, il nous raconte l'histoire vraie de Christophe André, comptable dans une ONG dans le Caucase, kidnappé et pris en otage en juillet 1997 par des activistes tchétchènes. Au fil des 400 pages de ce dense volume, on vit l'attente avec Christophe André, terriblement bien restituée. Une attente qui a duré 111 jours. Autant de jours seul dans une pièce, menotté à un radiateur, de journées rythmées par le passage de ses geôliers lui apportant eau et nourriture, trois fois par jour. Autant d'heures à ne rien faire, à part gamberger : quand sera-t-il libéré ? L'ont-ils oublié, à Paris ? Survivra-t-il à cette expérience ? La tension est énorme, l'attente fébrile, et l'empathie avec le personnage de plus en plus forte.
Guy Delisle signe un récit très fort, intense, et surtout très juste, servi par un dessin sobre et épuré, dans des teintes bleu-gris assez glaçantes. Une belle réussite et aussi un bel hommage à ces hommes et femmes engagés dans l'humanitaire qui bravent les dangers de régions instables.
Delphine
Septembre 2016
Gallimard vient de sortir une compilation de quinze portraits BD décalés mais véridiques réalisés par Pénélope Bagieu pour le blog du journal Le Monde.
Le point commun de ces portraits : ils sont tous consacrés à des femmes qui ont pris en main leur destin pour ne faire que ce qu'elles voulaient. Des femmes qui réclament le droit d'être pleinement femmes, avec leurs différences et leur identité propre, et qui ont aidé à l'émancipation de la femme, à leur manière.
Avec son mordant caractéristique et son coup de crayon hyper expressif, la culottée Pénélope Bagieu nous raconte la vie authentique de ces femmes qui ont plus ou moins marqué l'Histoire à travers les âges (certaines sont très célèbres, d'autres ont été beaucoup plus oubliées). On traverse les époques, les continents, on découvre des histoires amusantes, d'autres plus graves, on apprend plein de choses et on rit beaucoup mais on ne perd pas de vue la cause féminine qui est le fil rouge et le fer de lance de ce roman graphique. Une belle réussite !
Delphine
Paru en septembre 2016
Miles Hyman a mis beaucoup de son talent et de son coeur à l'adaptation en BD de la nouvelle de sa grand-mère, Shirley Jackson, nouvelle qui fit grand bruit lors de sa parution en 1948 dans le New York Times. Il faut dire que la chute de ce texte était assez terrible et que beaucoup d'Américains en furent choqués à l'époque...
C'est le début de l'été, le 27 juin précisément. Les quelques familles d'un petit hameau de Nouvelle-Anglettere se préparent au rituel annuel de la loterie, avec une excitation mêlée d'appréhension. L'enjeu de la loterie ? C'est tout l'objet de l'intrigue qui sera dévoilé dans la chute finale... Mais ce que Miles Hyman a réussi à dépeindre avec brio, c'est l'ambiance des heures qui précèdent cette chute. Avec ces pages qui prennent le temps de la langueur d'un jour d'été, ces silences qui alourdissent l'ambiance peu à peu, ces grandes images figées sur l'un ou l'autre moment du jour, Miles Hyman décrit l'attente avec une efficacité redoutable. Et pour ne rien gâcher, le résultat est d'une beauté rare : les planches semblent tout droit sorties des tableaux de Denis Hopper, avec de profondes couleurs, des portraits presque picturaux, des images très fortes. La tension monte réellement jusqu'à la chute. Saisissante.
Une bande dessinée à couper le souffle...
Delphine
Paru en septembre 2016.
Découvrez la Corée du Nord à travers les yeux de Jun Sang, ce petit garçon de huit ans qui a l'immense honneur de fêter son anniversaire le même jour que Kim Jong-Il, demi-dieu et maître de la Nation. Une aubaine dans un pays où l'on ne célèbre jamais les anniversaires, à part celui de leur leader : ainsi, le jeune garçon a chaque année le sentiment que c'est lui qu'on fête...
Dans un premier temps, le petit Jun Sang, endoctriné par la propagande, n'aura de cesse de défendre sa patrie, son leader qui veille sur leur destin, ses héros de guerre, tout en haïssant leurs ennemis jurés : les "fantoches de Corée de Sud" et les "chiens d'Américains". On découvre alors avec un oeil intrigué le quotidien des enfants sous ce régime, leurs loisirs, bien maigres, leurs tâches, parfois bien lourdes et absurdes, mais aussi un grand enthousiasme propre à l'innocence de l'enfance : Jun Sang aime sincèrement et naïvement son pays.
Mais petit à petit, le regard de Jun Sang va changer, passant de l'admiration à la déception, à l'angoisse : la famine impose sa loi en Corée du Nord, la famille de Jun Sang tente de fuir, sans succès... Ils sont rattrapés et internés dans un camp de prisonniers. Sous le vernis, Jun Sang découvre le vrai visage de son pays, celui de la dictature.
Aurélien Decoudray, scénariste et journaliste de formation, parvient à créer l'ambiance, à camper ses personnages, à restituer le régime de Corée du Nord avec précision et efficacité. Le dessin sobre de Mélanie Allag, avec ses décors simples, ses visages ronds presque caricaturaux, son expressivité, nous aide à voir avec les yeux d'un enfant. Le résultat est surprenant : captivant et terrifiant à la fois. Un vrai documentaire pour tous ceux qui veulent en savoir plus sur les régimes dictatoriaux et sur la Corée du Nord.
Delphine
Août 2016
"Etunwan" ou "Celui-qui-regarde". C'est ainsi que les Indiens Sioux Oglalas baptisèrent Joseph Wallace, photographe de profession, lorsqu'ils firent sa connaissance en 1867 dans les Montagnes Rocheuses. Joseph Wallace y accompagnait une expédition scientifique chargée de faire le relevé cartographique de la région. Il y a été subjugué par l'immensité des paysages de cet Ouest américain et marqué par la rencontre avec ces tribus indiennes qui lui laissait entrevoir un autre monde que le sien, fait de traditions ancestrales et régi par les lois de la Nature.
Car il s'agit bien de la rencontre de deux mondes dont il est question dans ce roman graphique : la civilisation américaine en plein développement industriel et démographique, et la civilisation indienne, malheureusement déjà en voie de disparition. Joseph Wallace est frappé par les différences entres les deux univers et touché par le mode de vie des Indiens. Il décide de les immortaliser par la photographie, son métier. Entre 1867 et 1869, il monte plusieurs expéditions dans les Rocheuses, afin de rester en contact avec les Sioux et de mener à bien son projet. Il en ramène quantités de photographies qu'il essayera de faire exposer et publier.
L'histoire de Joseph Wallace a été imaginée par Thierry Murat. Pourtant, ce personnage de fiction paraît authentique et nous touche par son projet, son parcours et les réflexions sincères qu'il nous livre à travers ce livre narré à la première personne. On apprend aussi beaucoup sur l'histoire et la disparition des civilisations indiennes d'Amérique et sur l'histoire de la photographie.
Avec son dessin sublime dans les teintes sépia, relevé par des noirs profonds à l'encre de Chine, Thierry Murat a réussi à restituer l'ambiance en clairs-obscurs des clichés photographiques de l'époque où la photographie en était à ses premières heures. Un réel charme se dégage de ces pages aux images superbes, aux longs silences et à l'émotion palpable. Un vrai coup de coeur !
Delphine
Paru en août 2016.
Macaroni !, c'est l'histoire de l'immigration italienne dans la Belgique d'après-guerre. C'est aussi et surtout l'histoire touchante de la rencontre entre Roméo, 11 ans et son "Nonno", Ottavio, ancien mineur au Bois du Cazier à Charleroi. Il faut dire qu'au début de cette semaine de vacances forcées chez son grand-père, Roméo n'est pas très enthousiaste à l'idée de passer quelques jours avec celui qu'il appelle "le vieux chiant", ce papy bougon qu'il ne connaît presque pas. Car Ottavio est un homme un peu rêche, empêtré dans ses souvenirs pas toujours heureux, qui se livre peu. Heureusement, ses journées sont égayées par la compagnie de la pétillante voisine, Lucie, et du cochon de son "Nonno", prénommé Mussolini... Mais au fur et à mesure que les jours passent, les liens vont se tisser entre le grand-père et son petit-fils, les souvenirs affleurer, et Ottavio va se raconter à Roméo, contre toute attente.
Voici un très beau récit où l'émotion est palpable, où le scénario subtil de Vincent Zabus nous tient en haleine, le tout servi par le dessin savoureux et sensible de Thomas Campi. Un roman graphiques qui nous parle de l'importance de la mémoire avec humilité et nostalgie, et qui sent bon l'Italie, avec ses couleurs chaudes de briques, de tomates et d'été.
Delphine
Avril 2016
Camille Jourdy nous avait séduit avec sa trilogie Rosalie Blum, objet d'une récente adaptation au cinéma, trilogie qui soit dit en passant, vient d'être rééditée chez Actes Sud BD dans un très beau volume aux couleurs tendres. Elle nous revient avec cette chronique familiale mettant en scène une famille comme les autres, ou presque, dans une petite ville de province française. On y suivra deux soeurs trentenaires : Marylou au caractère bien trempé, en situation familiale et conjugale délicate, et Juliette, sa jeune soeur hypocondriaque en pleine crise identitaire qui a décidé de quitter Paris pour passer quelques semaines chez son papa.
Camille Jourdy, habile et toujours très juste pour dépeindre le quotidien, nous livre une tragi-comédie parfaitement maîtrisée, vaudevillesque par moments, mais surtout très tendre, qui nous fait furieusement aimer ses personnages. C'est frais, c'est doux, à l'image de ses dessins délicats, aux traits fins et aux couleurs joyeuses presque naïves. Un roman graphique subtil, plein de grâce et d'humour dans lequel nous vous recommandons de plonger sans attendre.
Delphine
Février 2016.
Après la sortie récente du long-métrage inspiré de l'album "Paul à Québec", voici le huitième opus des aventures absolument savoureuses de Paul, ce jeune Québécois "so cute" qui fait chavirer le coeur de tous les amateurs de bons romans graphiques et du pays des caribous : le Québec. Comme dans ses albums précédents, Paul se livre à nous en toute simplicité, dans une ambiance québécoise franchement typique. Après nous avoir raconté Paul jeune adulte dans ses albums précédents, Rabagliati remonte dans le temps dans cet épisode, et nous fait retrouver Paul adolescent, en 1976. Il a 16 ans, n'est pas très bien dans sa peau, vient de changer de quartier et d'école, se fait de nouveaux copains, et passe pas mal de temps dans la maison de vacances de ses parents dans les Laurentides, au Nord de Montréal, au milieu des grands espaces. Cet album est celui des premières fois pour Paul : première cuite, première mobylette, premier joint, premier amour et premier chagrin. Bref, on retrouve en Paul tout ce qu'on a pu vivre en tant qu'adolescent, avec ses côtés exaspérants et ses côtés touchants, ce qui nous le rend une fois de plus très attachant. Traité en bichromie, avec ce trait expressif qui lui est propre, cet album est toujours aussi juste et sent bon la nostalgie et le sirop d'érable. Délicieux !
Delphine
Novembre 2015
Après le très remarqué album Portugal, Cyril Pedrosa nous revient avec un magnifique roman graphique, à l'émotion palpable : Les équinoxes.
S'y croisent des personnages de différents horizons, Louis, Vincent, Camille, autant de destins solitaires en quête d'un sens à donner à leur vie. Louis s'est toujours battu pour des causes qu'il estimait justes, mais décide que le temps est venu de se poser. Vincent, orthondiste, cherche un second souffle après son divorce et renoue contact avec son frère. Camille, jeune femme employée comme ouvrière dans une usine, rompt avec sa vie terne et plaque tout pour photographier le monde qui l'entoure. Un roman graphique polyphonique empreint de nostalgie sur le thème de la solitude, du temps qui passe, du retour à l'essentiel.
Cyril Pedrosa parvient dans ce récit en quatre temps, en quatre saisons aux ambiances bien marquées, à tisser des liens entre ces solitudes égarées avec un talent indéniable et des dessins d'une rare beauté. Lumineux !
Delphine
Octobre 2015
Août 1973, la famille Faldérault s'apprête à partir en vacances dans sa 4L rouge. Mais s'est sans compter le retard de Pierre, paternel de la famille, et dessinateur de bandes dessinées qui doit terminer d'arrache-pied le dessin des planches qu'il a promises à son éditeur. Quand la famille embarque enfin, on relâche enfin la pression et on démarre en trombe dans la joie et la bonne humeur... Cap au Sud, comme chaque année, pour un "bel été" !
Dans ce Road moovie touchant, où défilent les paysages depuis la grise Belgique jusqu'à l'ensoleillée Ardèche, Zidrou et Lafebre nous livrent un portrait sensible de cette famille qui sous le vernis joyeux, cache quelques blessures, quelques égratignures. La tante Lili est très malade, les enfants se disputent, mais surtout, le couple bat de l'aile et sait que ce seront les dernières vacances en famille, sans avoir osé l'avouer aux enfants... Mais sous le soleil du Sud, bien des choses peuvent changer, et la vie semble plus belle, surtout quand on décide de se recentrer sur l'essentiel.
Un album servi par le dessin tout en finesse de Jordi Lafebre et les chatoyantes couleurs qui sentent bon l'été. Une histoire qui a beaucoup de charme et qui vous fera furieusement penser à ces beaux étés de votre enfance.
Delphine
Septembre 2015 - existe aussi en format numérique.
Zeina Abirached est incontestablement douée pour faire vibrer le noir et blanc, le faire vivre sous nos yeux. Elle nous le prouve dans ce roman graphique très réussi et virtuose, où elle nous livre un portrait tout en nuances de son histoire familiale. Un album passionnant qui nous balade entre le Paris contemporain où le lecteur la découvre en jeune artiste Libanaise exilée et le Beyrouth des années 60 de son arrière-grand-père, Abdallah Kamanja, musicien ingénieux et inventeur d'un étonnant piano oriental qui a la particularité de jouer les quarts de tons propres à la musique d'Orient.
Comme l'avait fait l'Iranienne Marjane Satrapi avant elle, dans un Persepolis qui semble avoir inspiré la jeune Libanaise, Zeina Abirached porte un regard tendre et détaché sur l'histoire de sa famille, et sur le Liban d'avant la guerre. On plonge dans l'ambiance de la ville, dans son charme désuet, rétro, on s'amuse de la manière dont l'auteure dessine Beyrouth et se joue des sons et des onomatopées, comme une musicienne.
Son dessin est très graphique, presque géométrique, vraiment ingénieux, absolument unique. Et si ses noirs sont profonds et ses blancs éclatants, c'est pourtant un album tout en nuances et en quarts de tons qu'elle nous laisse découvrir. Car Zeina Abirached est bien une femme à moitié Libanaise, à moitié Française, à moitié francophone, à moitié arabophone, se sentant toujours à la frontière entre la culture d'Occident et d'Orient. Et ce sont ces interrogations sur son identité mixte qu'elle nous livre aussi dans ce roman graphique.
Un album vraiment étonnant à découvrir.
Delphine
Septembre 2015 - existe aussi en format numérique.
Le premier tome de cette série, Fauve d'Or du Festival d'Angoulême en 2015, avait fortement marqué les esprits. C'est donc avec beaucoup d'impatience et pas mal d'émotion que nous retrouvons le petit Riad, enfant de six ans, blond comme les blés, grandissant dans la Syrie d'Hafez el-Assad, dans les années 80. Dans ce récit autobiographique, Riad Sattouf nous décrit son quotidien, dans un petit village près de Homs, entre sa maman bretonne, qui s'acclimate comme elle peut, et son papa syrien, dont l'ambition reste plus que jamais de faire de son fils un Arabe moderne et éduqué, bref, un Arabe du futur. Il y raconte sa première année sur les bancs de l'école, la maîtresse et ses coups de règle, les nouveaux copains, l'art de la débrouille.
Le ton candide de l'enfant contraste avec la violence de ce quotidien plutôt sombre où rien n'y personne n'est épargné : ni le pays, ni ses habitants, ni même son père, qui sont tous croqués par Riad Sattouf avec le même humour corrosif qui avait fait mouche dans le premier tome. Le dessin terriblement expressif rend palpables les personnages et le traitement des couleurs en bichromie nous plonge dans une ambiance particulière. Bref, c'est comme si on y était, en Syrie, en 1984.
Si vous n'aviez pas lu le premier opus, lisez sans hésiter ce deuxième tome, à la fois touchant et percutant. Vraiment incontournable pour les amateurs de bonnes bandes dessinées et pour tous ceux qui veulent découvrir la Syrie avec le regard d'un enfant.
Delphine
Sylvain Savoia, le talentueux dessinateur de la série "Marzi" scénarisée par Marzena Sowa, s'est lancé cette fois en solitaire dans cette belle aventure artistique et humaine qu'a été la création et l'écriture de cette bande dessinée.
Contacté par l'archéologue Max Guérout, il a accompagné plusieurs expéditions montées par l'UNESCO sur le petit îlot des Sables, perdu en plein coeur de l'Océan Indien. Son projet : mettre en dessin l'incroyable histoire de ces esclaves malgaches naufragés puis abandonnés par les blancs en 1761 sur cette petite bande de terre et qui, par leur force et leur courage, ont réussi à y s'adapter et à y survivre pendant quinze ans. Sur base de documentation et aidé par les fouilles effectuées sur place par les archéologues, Savoia nous fait partager avec beaucoup d'humanité la destinée de ces hommes, ces femmes, ces enfants abandonnés dans un tel isolement.
En écho, il nous livre le récit sincère et très engagé de son séjour sur l'île déserte, face à l'immensité de l'Océan, avec pour seule compagnie l'équipe de scientifiques le jour, et les milliers de bernard-l'hermite la nuit. Un vrai journal de bord où l'auteur essaie d'entrevoir ce qu'ont pu ressentir les naufragés au XVIIIe siècle et nous dévoile ses pensées, ses réflexions et ses émotions dans une telle aventure.
Cette bande dessinée, servie par un dessin précis et touchant, est une très belle leçon d'humanité, avec beaucoup de souffle !
Delphine
Assez unique en son genre, cette bande dessinée vous étonnera certainement !
Nous y suivons le destin d'une famille en pleine déliquescence : celle des von Schlitt, aristocrates dont l'heure de gloire appartient déjà au passé et qui tentent de garder la tête hors de l'eau dans une Prusse en pleine mutation en ce début de XXe siècle. Entre un père à la figure imposante, ancien grand cavalier héroïque de Prusse qui laissa une de ces jambes au combat, et la figure absente d'une mère en cure permanente dans un sanatorium en Suisse, les deux jeunes frères von Schlitt tentent de répondre aux exigences d'une famille de haut rang, et de faire honneur à la Tradition, mais chacun à sa manière. Oswald, l'aîné est fonceur et bagarreur, et Ludwig, le second, est rêveur et effacé. A l'école des cadets, ils se feront remarquer pour des raisons différentes et marqueront l'histoire d'une manière tout à fait inattendue... et en changeront le cours.
Avec cette intelligente uchronie, le très inspiré et étonnant auteur flamand Simon Spruyt nous plonge dans cette atmosphère fin de règne et nous décrit avec beaucoup de finesse les errements intérieurs de deux adolescents en pleine quête d'identité. Il parvient aussi avec son dessin à l'aquarelle d'une grande beauté à créer de troublantes ambiances où le lecteur se retrouve immergé avec plaisir... avant la douche froide finale !
Une bande dessinée saisissante à découvrir !
Delphine