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Hubert Antoine est d'origine namuroise, désormais exilé au Mexique. C'est sur sa nouvelle terre d'accueil que ce premier roman surprenant et passionnant prend place.
Melitza est une jeune Mexicaine de 23 ans que nous allons apprendre à connaître à travers ses carnets de notes, sorte de journal intime. Orpheline de mère depuis sa naissance, elle a été élevée par son père excentrique mais aimant qui lui a transmis une série de valeurs sociales et le goût de la vie. Un soir, elle est sera victime d'un terrible viol et va être amenée à fuir après le meurtre de ses agresseurs.
Le roman nous entraîne dans la fougue de le jeunesse de Melitza, à travers ses émois, ses amours, ses envies, ses rêves, beaux et naïfs aussi. Mais c'est aussi le Mexique qu'on découvre, la richesses de sa culture et de ses traditions, c'est une vraie ode à ce pays à la fois magique et terriblement violent, corrompu, inégalitaire, un pays qui ensorcelle.
Comme souvent aux éditions Verticales, la plume de l'auteur est belle, fluide, entraînante, sans accro. On est littéralement porté par le texte, sans effort. Et on est balloté entre la légereté de la jeunesse de Melitza et les évènements tragiques de sa vie. Un texte à la fois intime et politique, à découvrir assurément.
Catherine
Janvier 2016 - également disponible en format numérique.
Comment l'arrière-petite-fille d'un certain Joseph Davrichewy, camarade et "presque" frère de l'autre Joseph, Staline, nous replonge dans la Géorgie du début du XXe siècle, et dans l'histoire de la révolution russe.
Un récit étonnant, porté par la fascination de l'auteure pour son arrière-grand-père, et son amour pour son père, qui nous fait découvrir un bouillonnant Staline, dans la force de la jeunesse, et un intrépide arrière-grand-père au caractère bien trempé.
Un roman touchant sur la mémoire familiale.
Delphine
Janvier 2016
Lyonel Trouillot est un grand auteur haïtien qui entraîne régulièrement ses lecteurs aux confins de l'âme humaine, mais aussi, à la recherche de l'âme des lieux, des quartiers, des rues...
Dans son dernier roman, on découvre cinq "amis" (Popol, Joëlle, Sophonie, Wodné, et le narrateur) qui résident à la rue de l'Enterrement, rue qui mène au cimetière de la ville. Le lieu peut sembler misérable si l'on s'en tient aux revenus de ses habitants mais la rue abrite en réalité des gens emplis de conviction, de rêve, de soif de savoirs, des militants, des sages aussi (Man Jeanne, Le "petit professeur"). Bref des gens non moins valeureux (au contraire) que les hommes politiques ou les humanitaires qui envahissent le pays. Les cinq amis de la rue de l'Enterrement grandissent en empruntant des chemins différents qui les éloignent les uns des autres. L'une d'entre eux travaille au "Kannjawou", un mot qui signifie fête et partage dans la culture traditionnelle haïtienne mais qui est aujourd’hui le nom d'un bar branché où se retrouvent les expatriés et les nantis de l'île. Le "Kannjawou", c'est le symbole de la déroute du pays.
Dans ce pays qui souffre tant et où la frontière entre le monde des morts et celui des vivants semble toujours si ténue, quel avenir les jeunes de la rue de l'Enterrement peuvent-ils entrevoir? Trouillot nous monte qu'Haïti est pleine de ressources, que ses habitants sont prêts à prendre leur destin en main mais qu'ils sont pris en tenaille entre la corruption des hommes au pouvoir, l'aide humanitaire qui amène ses propres manières de fonctionner en empruntant à la culture locale ce qui l'arrange. Ces éléments détruisent la solidarité du peuple qui semble pourtant prêt à se battre pour son avenir.
Catherine M
Janvier 2016 - existe aussi en format numérique
Quelques liens pour en savoir plus
On ne sort pas indemne de ce roman, bouleversant, cruel et tendre à la fois.
Sorj Chalandon y raconte son enfance auprès d’un père violent et mythomane, et d’une mère effacée. Mais l’intention de Chalandon n’est pas d’apitoyer le lecteur sur son sort d’enfant battu, et le ton n’est pas larmoyant. Loin de là. Suite au décès récent de son papa, il a en effet décidé de raconter ses blessures d’enfance, afin de mieux les cicatriser.
Il raconte les délires et la violence de son père, dont il ne connaîtra jamais la profession, mais qui était à ses yeux un incroyable agent secret, ce père qui l’entraînera toute sa jeunesse à devenir soldat d’une association secrète, en vue de l’assassinat du Général De Gaulle. Il raconte sa mère, maltraitée, passive face à ces violences, l’ombre d’elle-même, dans un réel déni de la maladie mentale de son époux. Il racontera aussi comment tous ces mensonges le faisaient aussi rêver au destin fabuleux de son père… A 12 ans, on ne remet pas en question les paroles de son papa.
Sorj Chalandon nous touche aussi particulièrement dans la seconde partie de son roman quand on découvre son double autobiographique, Emile, essayant de renouer contact avec ses parents après des dizaines d’années de salvatrice et nécessaire prise de distance. On y sent toute la tendresse d’un homme qui essaye d’oublier, de tourner la page, de tendre la main malgré tout.
Profession du père est un récit conté d'un rythme soutenu, intime, mordant, un vrai coup de poing. Un livre qui ne laissera personne indifférent.
Delphine
Septembre 2015
Nous sommes en république Tchèque, en 1941, où on assiste à la déportation de nombreuses familles vers le ghetto de Terezin. A travers une langue d'une grande richesse, l'auteur nous offre une ambiance, une atmosphère, des visages, des gestes et nous entraîne au cœur du ghetto. On partage la vie d'une homme pendant environ deux ans, une vie de pauvreté, de misère, de tristesse mais où des rayons de soleil, des gestes de solidarité, de complicité parviennent à percer la noirceur quotidienne. Un texte court, vif et poétique qui happe le lecteur.
Catherine
Septembre 2015 - disponible également en format numérique.
Virgil, Chancal, Assan, Iman fuient la guerre, la violence, la misère... Tantôt brutalement, parfois délicatement, on découvre leurs histoires sous la plume de Pascal Manoukian, ça retourne les tripes, ça secoue, ça perturbe nos univers douillets.
Au fil du livre, le quotidien dur et cruel des réfugiés et migrants en Europe est décrit. Une terrible scène nous amène sur un parking, à la fine pointe de l'aube, dans la banlieue parisienne. Les camionnettes passent chercher la main d’œuvre nécessaire pour la journée, on négocie (ou pas) les prix, les tâches, les conditions de travail. Si on est seul, non intégré dans une communauté, un réseau, c'est l'exploitation assurée...
Ce premier roman nous a particulièrement touchées. Le texte bien construit nous entraîne au cœur des vies de chacun de personnages. L'auteur dépeint une réalité amère et âpre mais il nous montre aussi que des petits gestes, des rencontres, peuvent changer la destinée. Une texte à découvrir sans hésiter, tant pour son contenu (malheureusement terriblement actuel) que pour la plume de l'auteur qui tient son lecteur en haleine tout au long du roman.
Catherine
Août 2015 - existe aussi en format numérique.
Intriguée depuis longtemps par la famille Mendelssohn, par Moses Mendelssohn, le penseur humaniste du XVIIIe siècle épris de libertés et par Félix Mendelssohn, le grand compositeur romantique, Diane Meur s'est finalement lancée dans l'aventure et attaquée à un travail de longue haleine, celui de dresser le portrait de cette immense famille, et d'en dessiner avec précision la "carte généalogique". L'ouvrage tient ses promesses en nous livrant une peinture historique foisonnante et pointilleuse de la grande communauté des Mendelssohn, depuis l'époque de Moses jusqu'à nos jours. Mais c'est finalement davantage le témoignage de l'auteure, Diane Meur elle-même, qui s'y met en scène et qui s'y livre, qui touchera le lecteur. L'écrivain s'y raconte comme souvent dépassée par l'ampleur de son sujet, parfois perdue dans cet arbre généalogique tentaculaire, mais toujours passionnée par ses recherches... et le roman devient celui de son enquête, entre Paris et Berlin.
La carte des Mendelssohn est un ouvrage érudit pour les amateurs d'histoire qui y verront comment de multiples influences peuvent métisser l'histoire d'une famille à travers les siècles. C'est surtout un récit touchant sur le travail de création où l'auteure se livre avec beaucoup de sincérité et une salutaire dose d'humour.
Delphine
Août 2015
Delphine de Vigan qu'on ne présente plus, (chacun se souvient des Heures souterraines et Rien ne s'oppose à la nuit), nous livre un roman d'une habileté diabolique, qui nous tient en haleine de la première à la dernière ligne.
Elle soumet en même temps à la réflexion du lecteur des questions majeures : le rapport entre le réel et la littérature, de même que celui qui unit (voire oppose) la réalité et la vérité.
"Ce pourrait être un projet littéraire, écrire un livre entier qui se donnerait à lire comme une histoire vraie, un livre soi-disant inspiré de faits réels mais dont tout, ou presque, serait inventé".
Véronique B.
Août 2015
L'empereur Charles Quint renonce à tous ses titres: il abdique. Le roman nous dépeint les mois durant lesquels il se défait du pouvoir et transmet à d'autres, non sans un certain soulagement, les responsabilités qui ont fait de lui l'homme le plus puissant du monde. Il va ensuite se retirer dans le monastère de Yuste, isolé dans la montagne.
Dans ce climat de dépouillement progressif où il assiste aux échecs de son fils et où le pouvoir semble peiner à se détacher de lui, il garde cependant l'esprit en éveil dans un domaine qui l'a toujours passionné: les horloges et leurs mécanismes. Une horloge astronomique en particulier va maintenir sa curiosité en alerte car il ne comprend pas son fonctionnement, différent des autres. Et notre curiosité à nous restera en alerte aussi jusqu'au terme du roman, où le mystère de l'horloge se dévoile.
Amélie de Bourbon Parme imagine mois après mois l'état d'esprit de l'empereur, puis de l'ex-empereur qui, souffrant et las mais aussi parfois impatient et tortueux, porte un regard désabusé sur son entourage et aspire à la retraite, au calme et à préparer sa mort, le tout portant un éclairage particulier sur son règne.
Outre son intérêt historique, Le secret de l'empereur est un superbe portrait d'homme, portrait politique, humain et philosophique, qui capte et retient notre attention tout le long du récit par ailleurs très bien construit.
Natacha
Août 2015
Un livre âpre et fort où l'on rencontre un homme, Daniel Avner, hanté par la disparition de sa famille dans un camp. Dès la fin de la guerre, son grand-père, lui aussi rendu fou par la perte des siens, lui imprime sa propre souffrance.
C'est l'histoire d'une impossibilité à habiter son corps, d'une culpabilité qui vide le corps de son existence, et de la rencontre qui redonnera à Daniel un peu de sa chair, non sans remous. C'est l'histoire de l'Histoire qui plie et tord les individus, les marque à vie et les rend fous. L'écriture de ce premier roman mérite d'être saluée pour sa justesse et sa qualité. C'est un roman dont on sort marqué, changé, éclairé sur l'humain, après être passé par toutes les couleurs de l'arc-en-ciel, car Elena Costa excelle à nous faire vivre presque physiquement les états de son personnage, et c'est assez terrible.
Natacha
Rentrée littéraire - août 2015
Comment raconter la vie, le sens de la vie, le sens d'une vie ? Par les histoires, par tout ce que nous aimons, l'intime du récit, l'équilibre inespéré entre celui qui dit et celui qui écoute, tous ces liens... Rien ne semble grave et pourtant, le destin peut basculer sur quelques mots. Lisez « La Source », une très belle histoire. Lisez la source une très belle histoire de secrets partagés entre Lottie, 90 ans, et la narratrice, jeune sociologue qui n'est certainement pas venue par hasard dans ce hameau proche de Langres...
Véronique
Août 2015
Nous sommes en 2037, Antoine sort de prison après 20 ans de détention et foule à nouveau les trottoirs de Paris. Ancien révolutionnaire criminel, il va redécouvrir le monde tel qu’il est devenu : pas si différent de celui que nous connaissons aujourd’hui, un peu plus technologique, un peu plus violent surtout. Après 20 ans d’isolement, il va aussi apprendre à renouer des relations humaines : avec des voisins de la cité Molière, avec ses nouveaux collègues, avec sa fille, qui semble elle aussi portée par sa volonté de changer le monde, radicalement. Mais de manière plus pacifiste que son père à l’époque…
Dans ce récit d’anticipation habilement mené, Denis Lachaud nous interpelle sur notre société, et ses possibles dérives futures. Inspiré de l’actualité brûlante du moment, l’affaiblissement de l’Europe, l’endettement de la Grèce ou de l’Espagne, l’augmentation de l’immigration et le manque criant de place pour les migrants, les mouvements révolutionnaires populaires qui se soulèvent un peu partout, ce futur qu’il nous décrit nous paraît crédible, et nous fait sans doute un peu peur par sa radicalisation. Mais Denis Lachaud trouve un ton juste et sincère qui n’est ni moralisateur, ni culpabilisant, mais plutôt volontairement utopiste, fantaisiste, parfois drôle, un ton percutant qui fait mouche.
Un roman qui donne à penser, sans se prendre trop la tête. Qui donne à rêver surtout à un autre monde. Et rien que pour ça, sa lecture en vaut le détour.
Delphine
Août 2015
Dans un Congo chahuté où la rivalité entre les ethnies et les jeux de pouvoir font la loi, Moïse, dit Petit Piment, appelé ainsi suite à un acte de bravoure, est un gamin qui, à 13 ans, n'a jamais connu que l'orphelinat de Pointe-Noire. Bien décidé à vivre sa vie, laissant derrière lui son meilleur ami, il décide de fuir et côtoie une jeunesse borderline. Jusqu'au jour de sa rencontre avec Mama Fiat 500 qui tient une maison de passe et le prend sous son aile. Ce seront des années heureuses pour Petit Piment... mais une décision municipale mettra à néant tous ses rêves de futur.
Emouvant, parfois drôle, Petit Piment symbolise la jeunesse africaine orpheline prête à tout (et à tous les sacrifices) pour exister.
Véronique B.
Août 2015
... "Ma voix elle vaut rien devant celle du colon - C'est parce que les Français ils disent qu'ils ont la prépondérance - C'est quoi, la prépondérance ? - C'est quand tu prépondères - Qu'est-ce que ça veut dire ? - C'est quand tu as les mitrailleuses et les Sénégalais - Les Français, ils disent que tu es prépondérant quand tu es plus civilisé - Plus civilisé ?..."
Voici un roman à rebondissements, conté d'un rythme soutenu et sur un ton moqueur.
Nous sommes à Nahbès, ville imaginaire, entre 1922 et 1924, une ville coupée en deux par un lit d'oued, très raviné... la rive gauche, la rive droite, la ville indigène, la ville européenne. Quand des Américains débarquent afin d'y tourner un film, "Le guerrier des sables", la petite ville est en émoi. Bruyants, d'allure frivole, surtout les femmes dont "les robes laissaient voir beaucoup de chair" et "qui s'installaient sans hommes à la terrasse des cafés", ils perturbent le monde policé des prépondérants, d'autant plus que les Américains "copains avec tout le monde, un officier à particule ou l'épicier Ben Machin, c'était quand même insultant... il y en avait même qui s'étaient mis à apprendre l'arabe... et les bicots, ils s'y croyaient déjà ". Mais la petite communauté américaine est aussi perturbée par une affaire qui défraie la chronique, là-bas, chez eux, dans le monde du cinéma, une histoire de viol suivie d'un décès.
Dans tout ce méli-mélo, on s'attache à Raouf, le fils du caïd Si Ahmed, bachelier doué qui a fréquenté le lycée français. Raouf rêve de liberté, de justice et d'indépendance. Raouf et Ganthier, un riche colon, effectueront "le grand voyage" qui les mènera de Paris à l'Allemagne. Belkhodja, commerçant prétentieux, aux rêves de grandeur, finira acculé par des dettes qui fera dire à un prêteur : "Quand la fête est finie, il ne reste que du linge sale".
On croisera la route d'un trio de femmes aux caractères bien trempés : Kathryn, une actrice américaine, Gabrielle Conti, une journaliste française et Rania, jeune veuve, intellectuelle, "sculpturale, des yeux en amande" qui a le goût des livres, lisant l'arabe et le français.
On pourrait dire encore beaucoup de choses sur cet excellent livre... notamment qu'on ne s'y ennuie pas une seconde.
Véronique B.
Août 2015
Etienne est photographe de guerre. Il a passé plusieurs mois enfermé, pris en otage dans un pays en conflit. Otages intimes, c'est l'histoire de son retour à la vie libre, retour qui ne coule pas de source et s'accompagnera d'autres douloureuses ou heureuses libérations. Car c'est peut-être le principal sujet de ce roman beau et touchant qui porte si bien son titre: les délivrances intérieures des autres personnages répondent à celles d'Etienne et en refermant le livre, le lecteur lui-même a l'impression d'avoir dénoué certains de ses liens. Otages intimes, c'est aussi une plongée dans la nature, une belle méditation sur l'enfance et un portrait de mère qui ne laissera pas indifférent... Si vous avez aimé Profanes, vous retrouverez avec bonheur l'écriture fine et sensible de Jeanne Benameur pour un livre qui, tant par le choix du sujet que par son traitement, égale largement le précédent.
Natacha
Rentrée littéraire - août 2015
Pourquoi se priver d'un voyage ailleurs, en Guinée Bissau grâce au talent de Sylvain Prudhomme ?
Printemps 2012, un jour apparemment comme un autre débute, pour Couto, merveilleux musicien du groupe mythique Super Mama Djombo, par une terrible nouvelle, la mort de Dulce, son premier amour, la chanteuse du groupe. La journée se passera pour lui en souvenirs mais aussi en rencontres, la ville bruissant de rumeurs précises sur la préparation d'un coup d'état...
Musique, politique, amours se mêlent dans ce récit captivant et très agréable à lire grâce à une écriture simple et belle.
Véronique
C'est effrayant et drôle à la fois. Vraiment drôle, et vraiment inquiétant.
Vernon est un ancien disquaire qui, de chute en chute, finit par se retrouver à la rue. Il avait son propre commerce, il côtoyait quelques stars. Il a dû fermer boutique et s'est progressivement isolé, quittant de moins en moins son appartement. Il perd coup sur coup trois vieux amis et finalement se fait expulser de son logement.
Mais ce n'est pas là ce que raconte le livre, c'est seulement là qu'il commence! Car Vernon commence alors une chasse à l'hébergement qui le conduit chez des anciennes connaissances et sont l'occasion pour Despentes de dresser toute une galerie de portraits de Parisiens d'aujourd'hui, côté rock, culture, sexe et drogues. Chaque personnage est crédible et bien charpenté, de la jeune femme hyperconnectée au scénariste aigri et manquant durement de lucidité, en passant par l'ancienne actrice de porno, par le trader fou et cocaïné (ça fait peur) et j'en passe.
Virginie Despentes peut être dure avec ses personnages, mais sans jamais passer la barre qui nous empêche totalement de nous attacher à eux, et c'est là ce qui fait la force de ce livre. Il nous parle bien du monde d'aujourd'hui et de nous, même s'il nous sort de notre univers. Cynique mais pas sur le même mode qu'un Houellebecq, le livre, bien que parfois désespéré, laisse la possibilité au lecteur de faire le choix de la révolte...même s'il laisse entendre qu'une révolte à la "Flower Power" ne serait plus suffisante ni suivie. A nous de voir...
Natacha
Janvier 2015
Fourmillante, trépidante, pétillante, Barcelone se révèle dans ce livre de Grégoire Polet, à travers une quinzaine de personnages très attachants dont les destins se croisent... ou pas. Un père qui cache ses soucis à sa famille, une journaliste aventurière, une femme en révolte qui occupe des places, s'installe dans un arbre, un squat, une gentille famille d’expatriés français,... Et puis, au centre, un personnage urbain : Barcelone. Comme dans un autre roman de Grégoire Polet où Paris jouait le premier rôle, c'est ici la bouillante capitale de la Catalogne qui est au centre du roman.
C'est rudement bien écrit, dans un style original qui ne manque pas d'humour. Et surtout, à travers ce roman choral, c'est l'Europe contemporaine en crise et en recherche d'une nouvel art de vivre ensemble qui se dessine, qu'on observe et qu'on rêve plus solidaire et apaisée à l'avenir.
Catherine
Janvier 2015 - existe aussi en format numérique.
La petite fille qui avait avalé un nuage grand comme la tour Eiffel, Romain Puertolas, Le Dilletante
Après le succès de son premier roman L'extraordinaire voyage du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea, Romain Puértolas a la barre haute pour réussir son deuxième roman. Et le défi nous semble relevé.
L'auteur nous entraîne encore une fois dans une aventure enlevée, rythmée, pleine de fantaisie, dans les airs entre la France et le Maroc. C'est l'histoire déjantée mais touchante d'une jeune factrice qui est prête à tout pour sauver sa petite fille adoptive marocaine, atteinte de mucoviscidose. Prête à voler de ses propres ailes...
Dans ce livre, on s'évade et on s'amuse de la peinture gentiment caustique que nous dresse Puértolas de la société d'aujourd'hui. Un moment de lecture très agréable, sans prétention, pour avoir l'humeur légère ... comme un nuage.
Delphine
Janvier 2015 - aussi disponible en format numérique.
Ce nouveau roman de Laurent Gaudé se passe en Haïti. On découvre une série de personnages dans les semaines qui précèdent le séisme de janvier 2010, et on les suit dans les premiers jours qui suivent le tremblement de terre.
On est face à un roman court mais d'une envergure incroyable. Dès les premières pages, on est happé par l'île d'Haïti, on la découvre, on la sent, on la touche presque, tellement les mots nous transportent vers cet ailleurs.
Les personnages sont terriblement attachants. A nouveau, malgré que le roman ne soit pas long, on est face à une vaste galerie de personnes qu'on a l'impression de connaître et auxquels on s'attache. Et ce qui est incroyable dans ce roman, c'est qu'en parlant de l'horreur qui a déchiré la terre d'Haïti et qui a plongé des milliers de personnes dans le deuil, la perte, la misère, c'est un ode au bonheur, à l'envie de vivre, de survivre, aux moments heureux qui parsèment notre existence, aux rires, aux amis que Laurent Gaudé met en scène.
Comme dans "Pour seul cortège" qui nous avait déjà séduites à la librairie et pour lequel nous avions eu la chance de recevoir l'auteur à Namur, Gaudé fait parler les vivants autant que les morts. Surprenant en partie mais terriblement juste.
On savait que l'écriture de Laurent Gaudé était de grande qualité et, à nouveau, on retrouve le lyrisme, la musicalité des mots, la sensualité du texte qui s'écoute autant qu'il se lit. Un roman à ne pas rater dans cette rentrée littéraire hivernale.
Catherine
Hiver 2015
Poétique, politique, émouvant, instructif, ce court texte de 160 pages est d'une force rare. L'auteur rend une sorte d'hommage au peuple vietnamien en s'adressant à une petite fille, Liên, qui vit dans le Nord du Vietnam. Lourdement handicapée car descendante d'un père contaminée par l'agent orange lors de la guerre du Vietnam, Liên mène une vie détruite. L'agent orange, c'est cet herbicide composé en grande partie de dioxine et déversé par l'armée américaine entre 1961 et 1971 par hectolitres au dessus de la forêt vietnamienne.
Le livre de Jean-Marc Turine nous amène à découvrir le quotidien de toute une série de familles dont les enfants sont touchés par les conséquences de cette guerre chimique menée parfois plusieurs dizaines d'années avant leur naissance. C'est aussi une manière d'apprendre ce qui s'est passé durant la guerre du Vietnam. L'auteur ne se cache pas pour dénoncer la malveillance des industries chimiques, toujours non-condamnées aujourd'hui.
Alternant prose poétique, photo, texte court, c'est une lecture vivifiante, poétique et originale qui nous est proposée. Voilà un livre qui sort de l'ordinaire, tout en étant accessible. Quelle belle découverte.
Été 1936. L'Espagne est déchirée par une guerre civile d'une violence sans nom : les nationalistes phalangistes de Franco, soutenus par le clergé, imposent la loi de la terreur pour contrer les assauts impétueux des républicains qui rêvent de construire une nouvelle Espagne.
Dans ce roman, deux voix émergent et s'entrelacent, pour évoquer cet été sanglant. Deux voix très différentes mais deux voix sincères qui ont à cœur de livrer leurs souvenirs, leurs émotions, de témoigner. La voix de George Bernanos d'abord, qui, tout ultra catholique et monarchiste qu'il est, crie son dégoût et dénonce avec force l'épuration systématique dont il a été témoin à Majorque, perpétrée par les nationalistes. Celle de Montse ensuite, jeune fille de seize ans et mère de la narratrice, qui se souvient et raconte dans une langue unique, à mi-chemin entre le français et l'espagnol, tout l'émerveillement que provoqua en elle l'insurrection libertaire de cet été où le monde s'ouvrit à elle et où elle découvrit l'amour.
Lydie Salvayre nous livre ici une œuvre romanesque portée par un vrai souffle, et arrive à nous faire revivre cette sombre période de l'histoire, dans un petit village catalan avec ses ombres, ses secrets, ses peurs, ses haines fratricides. Elle nous impressionne surtout par son écriture vivante et forte, créative, vraiment surprenante.
Ce roman à obtenu le prix Goncourt 2014.
Delphine
Rentrée littéraire - septembre 2014 - disponible aussi en format numérique
Il faut accepter de se perdre un peu dans le nouveau livre de Patrick Modiano, entre le quotidien du narrateur et les bouffées de souvenirs qui lui reviennent en mémoire. Nostalgique et mélancolique mais assurément un beau livre.
Partick Modiano vient de recevoir le prix Nobel de littérature qui couronne l'ensemble de son oeuvre.
Véronique B.
Nouveauté - octobre 2014
Voici un roman épistolaire très attachant qui nous décrit avec beaucoup de vie l'époque où des artistes avant-gardistes comme Paul Gauguin ou Vincent Van Gogh ont révolutionné le monde artistique.
1888, Hugo Boch, héritier d'une riche famille belge, décide d'aller passer quelques mois à Pont-Aven en Bretagne, dans une pension de famille, avec une bande d'artistes précurseurs à la créativité débordante, afin de se spécialiser dans un art tout nouveau : la photographie. Commence une période foisonnante pour le jeune homme, qu'il décrira dans ses nombreuses lettres à sa cousine, Hazel, qui étudie la peinture à Paris, et à son meilleur ami, Tobias, inscrit aux Beaux-Arts à Bruxelles.
Anne Percin nous plonge littéralement dans cette époque d'effervescence artistique, entre la Bretagne, Montmartre et Bruxelles, et nous donne à réfléchir sur les codes dans l'Art et sur l'art de les bouleverser... Elle parvient à lier avec beaucoup d'habileté la réalité historique et la fiction, en mêlant intimement les destins de grands peintres et de personnages de fiction.
Un roman à la lecture très agréable, fluide. Passionnant !
Delphine
Rentrée littéraire - août 2014
Il nous raconte avec humour et honnêteté un pan d'histoire a priori pas « sexy » : celle des hommes qui ont contribué à installer le christianisme, au premier siècle. Ce faisant, il nous captive et nous questionne. Son livre est érudit, intelligent, ouvertement partial (on l'est toujours). Il se met lui-même en scène sans complaisance. C'est bien Emmanuel Carrère... A lire, une fois de plus.
Natacha
Rentrée littéraire - août 2014