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Dans ce roman de Peter Ackroyd, nous plongeons dans le Londres populaire d'après-guerre, en suivant le destin de trois frères dans un quartier ouvrier du nord de la ville.
Si Harry, Daniel et Sam sont très soudés enfants, la famille va se dissoudre suite au départ brutal mais définitif de leur maman quand les trois garçons n'ont pas encore dix ans. Ils vont rapidement prendre leur indépendance et suivre des routes très différentes en fonction de leurs affinités et de leurs caractères : l'aîné, ambitieux et opportuniste, va gravir de manière fulgurante les échelons du quotidien Le Chronicle pour en prendre la direction très jeune, le second, intellectuel plus introverti, obtiendra une bourse pour la prestigieuse université de Cambridge ou il sera nommé professeur de Lettres et le cadet, solitaire marginal, finira homme à tout faire d'un puissant et sombre homme d'affaire dans l'immobilier.
À travers les destins croisés de ces trois jeunes hommes, Peter Ackroyd dépeint une réaliste, assez noire et foisonnante fresque de la ville de Londres, et nous décrit avec un flegmatisme tout british ses intrigues, ses jeux de pouvoir, son cynisme, dans le monde du journalisme, de la politique, de la littérature et des affaires.
Avec son écriture précise, Ackroyd parvient à rendre vivante la ville, à faire sentir les ambiances, les odeurs, les couleurs de chaque quartier. Il nous happe aussi dans une intrigue extrêmement bien ficelée où les voies de ses trois personnages centraux vont habilement se séparer avant de se recroiser plus loin.
Belle ambiance, roman passionnant !
Delphine
Paru aux Editions Philippe Rey en janvier 2015, le livre est paru en édition poche 10/18 en juillet 2016.
En 2011, l'ouragan Irene a laissé des traces de son passage dans le Vermont. Bonnie, la cinquantaine, a disparu ce jour-là, littéralement avalée par la tempête. Sa fille Vale, qui n'a plus vu sa mère depuis des années, revient au pays natal, dans la ferme intention de retrouver Bonnie. Ce sera l'occasion pour elle de renouer avec ses racines et sa famille, installée depuis des générations sur la Heart Spring Mountain, en pleine nature. Et d'essayer de comprendre l'histoire des femmes qui en ont fait partie, souvent marginales mais téméraires, fortes et fragiles à la fois. Des portraits très émouvants que nous découvrons au gré des découvertes de Vale, des secrets peu à peu révélés.
Robin MacArthur nous prend par la main pour nous conter l'histoire de cette famille au coeur de l'Amérique du Nord, terre sauvage et ancestrale où les hommes vivent en symbiose avec la nature, où l'histoire des amérindiens se mêle à celle des colons. En un récit mosaïque, la jeune romancière nous promène d'une époque à l'autre sur une centaine d'années, d'un destin à l'autre, dans des chapitres courts sublimés par sa langue si envoûtante. Un roman à l'émotion palpable. Coup de coeur !
Delphine
Paru en janvier 2019 et en édition poche en 2022. Existe aussi en version numérique.
Ce roman de Laurent Gaudé se passe en Haïti. On découvre une série de personnages dans les semaines qui précèdent le séisme de janvier 2010, et on les suit dans les premiers jours qui suivent le tremblement de terre.
On est face à un roman court mais d'une envergure incroyable. Dès les premières pages, on est happé par l'île d'Haïti, on la découvre, on la sent, on la touche presque, tellement les mots nous transportent vers cet ailleurs.
Les personnages sont terriblement attachants. A nouveau, malgré que le roman ne soit pas long, on est face à une vaste galerie de personnes qu'on a l'impression de connaître et auxquels on s'attache. Et ce qui est incroyable dans ce roman, c'est qu'en parlant de l'horreur qui a déchiré la terre d'Haïti et qui a plongé des milliers de personnes dans le deuil, la perte, la misère, c'est un ode au bonheur, à l'envie de vivre, de survivre, aux moments heureux qui parsèment notre existence, aux rires, aux amis que Laurent Gaudé met en scène.
Comme dans "Pour seul cortège" qui nous avait déjà séduites à la librairie et pour lequel nous avions eu la chance de recevoir l'auteur à Namur, Gaudé fait parler les vivants autant que les morts. Surprenant en partie mais terriblement juste.
On savait que l'écriture de Laurent Gaudé était de grande qualité et, à nouveau, on retrouve le lyrisme, la musicalité des mots, la sensualité du texte qui s'écoute autant qu'il se lit. Un roman à ne pas rater dans cette rentrée littéraire hivernale.
Catherine
Paru en hiver 2015, le roman vient d'être édité en édition poche chez Babel.
Sorj Chalandon signe un grand roman qui s'enracine dans les charbonnages du Nord de la France, autour d'un événement historique tragique : la catastrophe de la mine de Liévin qui fit 42 victimes le 27 décembre 1974.
Dans ce roman, nous allons revivre les événements historiques à travers les souvenirs d'un personnage de fiction, Michel Flavent, adolescent au moment des faits et hanté par la perte de son grand frère, Joseph, "tué par la mine". Obsédé par ce souvenir douloureux, ce dernier poursuit son existence avec une idée fixe en tête : venger son frère. Mais au fil des pages, nous découvrirons que l'histoire de cette famille au coeur de la catastrophe est peut-être plus complexe qu'on ne l'imagine au premier abord, que les responsabilités sont confuses, qu'il y est question de vengeance mais aussi de culpabilité. Et cette complexité est intéressante.
A mi-chemin entre une reconstitution historique fidèle et un roman de fiction (la famille Flavent a été imaginée par l'auteur), ce roman est avant-tout l'histoire d'un homme, Michel, dont le passé conditionne toute l'existence. Ce texte, écrit à la première personne, nous emporte dans les pensées de cet homme des Corons et se révèle d'une grande finesse psychologique.
Ce roman est aussi l'occasion pour Sorj Chalandon de rendre hommage à tous les mineurs de France et d'ailleurs qui y ont laissé leur vie, ou du moins, leur santé. L'auteur décrit avec beaucoup de respect la vie de ses hommes, leur engagement, dans l'ombre des mines. Une réalité qui nous touche aussi en Belgique, puisque cet événement tragique fait évidemment écho à d'autres catastrophes, comme celle du Bois du Cazier en 1956.
Comme toujours avec les romans de Chalandon, on est happés par son écriture et marqués par la force du propos.
Un roman passionnant !
Delphine
Paru en août 2017 aux Editions Grasset, le roman est paru en août 2018 au Livre de poche. Existe aussi au format numérique.
Isabelle Monin est romancière et journaliste.
Après avoir acheté à un brocanteur une enveloppe contenant 250 photos d’une famille française qui lui est totalement inconnue, elle est touchée par la banalité familière de ces Gens. Elle décide d’en tirer deux livres : un roman où elle inventerait leur vie et un récit de son enquête pour les retrouver et confronter la réalité à la fiction.
La démarche d’Isabelle Monin est bouleversante d’humanité et de générosité.
D’abord dans son roman où l’on ressent dans chaque phrase la tendresse qu’elle éprouve pour les personnages qu’elle a inventés, ses protégés : Serge, Michelle, Mamie Poulet, Mimi et surtout la petite Laurence.
Ensuite et surtout dans son enquête où elle nous livre ses enthousiasmes, ses peurs, sa timidité et son humilité face à ces Gens qu’elle retrouvera et qu’elle parviendra à convaincre de participer à son projet.
Isabelle Monin semble douée d’un 6e sens, celui de lire à travers le papier jauni des Polaroids les émotions, les sentiments, les relations, autant de coïncidences troublantes entre la vraie vie des Gens et celle imaginée.
Au-delà de ces personnages de chair et de papier auxquels elle parvient à nous attacher terribement (on tremble vraiment pour eux en lisant ce livre), c’est le thème de la mémoire qu’Isabelle Monin questionne : « Chaque vie mérite d’être racontée, chaque vie est un témoignage de toutes les autres. On racontera une époque, une terre, un petit monde. On racontera la vie des gens dont on ne parle jamais. Elle vaut autant que celle dont on parle – autant et si peu. Chaque vie est intéressante. Elle est universelle et singulière, elle est par essence bouleversante. »
Ce livre particulièrement original est aussi agrémenté d’un album de chansons d’Alex Beaupain inspirées de la vie des Gens dans l’enveloppe, et interprétées par certains d’entre eux. Il existe deux versions du Livre de poche, l'une avec les chansons à télécharger, l'autre accompagnée d'un CD.
Delphine
Paru en septembre 2015, ce livre a été édité en Livre de poche en octobre 2016.
"Oscar Lowe dirait plus tard à la police qu'il ne se rappelait pas la date exacte où il avait vu les Bellwether pour la première fois, quoi qu'il fut absolument certain qu'il s'agissait d'un mercredi."
Publié en français en 2014 chez le très chouette éditeur Zulma, ce roman se déroule en partie sur le prestigieux campus universitaire de Cambridge. Le protagoniste, Oscar (jeune infirmier en maison de repos) y rencontre un soir, attiré dans une chapelle par une musique magnifique, la belle Iris Bellwether. Celle-ci l'introduit dans son groupe d'amis. Parmi eux, son frère Eden, un organiste prodige un brin mégalomane, convaincu des vertus hypnotiques de sa musique.
Le Complexe d'Eden Bellwether nous captive tout du long et nous entraîne dans l'esprit sombre de ce mystérieux musicien, entre manipulation de son entourage et jeux pervers.
Une histoire comme on n'en lit qu'une!
Hélène
Paru en août 2014, format poche en août 2016. Traduit de l'anglais (Royaume-Uni) par Renaud Morin. Existe en format numérique.
Voici un roman épistolaire très attachant qui nous décrit avec beaucoup de vie l'époque où des artistes avant-gardistes comme Paul Gauguin ou Vincent Van Gogh ont révolutionné le monde artistique.
1888, Hugo Boch, héritier d'une riche famille belge, décide d'aller passer quelques mois à Pont-Aven en Bretagne, dans une pension de famille, avec une bande d'artistes précurseurs à la créativité débordante, afin de se spécialiser dans un art tout nouveau : la photographie. Commence une période foisonnante pour le jeune homme, qu'il décrira dans ses nombreuses lettres à sa cousine, Hazel, qui étudie la peinture à Paris, et à son meilleur ami, Tobias, inscrit aux Beaux-Arts à Bruxelles.
Anne Percin nous plonge littéralement dans cette époque d'effervescence artistique, entre la Bretagne, Montmartre et Bruxelles, et nous donne à réfléchir sur les codes dans l'Art et sur l'art de les bouleverser... Elle parvient à lier avec beaucoup d'habileté la réalité historique et la fiction, en mêlant intimement les destins de grands peintres et de personnages de fiction.
Un roman à la lecture très agréable, fluide. Passionnant !
Delphine
Rentrée littéraire - août 2016
Zeruya Shalev tisse un magnifique roman autour du thème de l'amour à travers la quête de trois personnages : Hemda, la mère, Dina, la fille et Avner, le fils. Hemda, à la fin de sa vie, alitée, repense à la dureté de son enfance au kibboutz, à la figure de son père adoré mais exigeant, à son mariage sans amour et à sa maternité problématique. Dina, prof heureuse en couple, vit mal la fin de la douce fusion avec sa fille unique, devenue adolescente et rêve d'adopter un autre enfant mais est-ce la bonne solution ? Avner, le préféré de sa mère, avocat des Bédouins et des Palestiniens, ne peut plus supporter son mariage raté et se perd dans la fascination d'un couple aimant entrevu à l'hôpital : il a vu le vrai visage de l'amour...
Dans ce livre profond, à l'écriture puissante, l'espoir arrivera comme une superbe éclaircie qui baignera ces trois personnages blessés.
Ce livre a obtenu le prix Femina en novembre 2014 et on s'en réjouit, c'est bien mérité.
Disponible aussi en format numérique
Ce roman d'un souffle inouï et d'une grande densité nous transporte, nous secoue et nous bouleverse.
C'est l'histoire d'un homme, celle d'un violon, celle d'un amour, d'une amitié, des hommes qui commettent le pire au nom d'un idéal, qui aiment et qui trahissent, des humains qui se perdent et se retrouvent.
Adriá, érudit et âgé, se remémore son enfance et sa vie d'adulte. Il s'adresse à Sara, la femme qu'il a aimée tout sa vie.
C'est aussi l'histoire de son violon, un objet d'une immense valeur, qui a traversé les siècles et connu l'Inquisition et Auschwitz, ce qui permet à Cabré de nous offrir une magnifique mise en perspective percée de questions, d'horreur mêlée de profonde humanité.
Un livre incontournable.
Paru en septembre 2013, format poche en mai 2016. Traduit du catalan par Edmond Raillard.
Ce grand roman, étalé sur trois siècles (du XVIIIème au XXème), suit la destinée de deux sœurs ainsi que de leur descendance, de la Côte-de-l'or (Ghana) aux États-Unis.
Effia la Beauté est mariée de force à un colon anglais. On l'emmène dans le fort des blancs à Cape Coast, et dans le cachot sous la chambre conjugale est enfermée, sans qu'elle le sache, sa demi-sœur inconnue. Esi y a été emprisonnée, avec des centaines d'autres hommes et femmes, en attendant d'être expédiée aux États-Unis où elle sera vendue comme esclave.
Chaque chapitre invite ensuite le lecteur dans la vie d'un fils, d'une arrière-petite-fille, d'un arrière-arrière-arrière-petit enfant d'une de ces deux femmes aux destinées contrariées. De Quey, fils métisse d'Effia, impliqué à la suite de son père dans le commerce d'esclaves; à Marcus qui, à la fin du XXème siècle, entame une thèse de doctorat à l'université en Amérique; cette multitude de récits aborde les sujets universels de la famille, de l'héritage et de la filiation, mais aussi les thèmes plus graves de l'esclavage, du racisme et de la violence sociale.
Cette très belle mosaïque, où chaque chapitre est un roman en soi, est un livre comme on les aime: de ceux qui nous font découvrir de nouveaux horizons et de nouvelles perspectives sur le monde.
Hélène
Paru en janvier 2017, et en au format poche en janvier 2018, traduit de l'anglais (États-Unis) par Anne Damour. Existe aussi en format numérique.
Pascal Manoukian, reporter avant d'être écrivain, avait été fort remarqué lors de la parution de son premier roman "Les échoués". Il nous revient avec un roman à nouveau terriblement contemporain. Les protagonistes que nous allons suivre sont en effet marqués par des drames liés à des actes terroristes et c'est au cœur de Daech qu'ils nous entraînent. C'est un livre captivant mais aussi effrayant.
La question des rapports entre différentes religions est posée dès les premières pages lorsqu'on fait la connaissance de Karim et Charlotte, deux français, amoureux, et bientôt parents. Elle a des origines arméniennes, lui vient d'une famille musulmane. Ils attendent leur premier enfant. Mais davantage que les rapports inter-religieux, ce qui est sur le grill dans ce roman, c'est notre condition humaine. Comment se construit la haine lorsqu'on naît dans notre occident si confortable ? Pourquoi se convertit-on à certaines croyances ? D'où vient-on familialement ? Comment pense-t-on nos rapports aux autres ? Karim va mener l'enquête alors qu'il est lui-même englué dans la souffrance et le deuil.
Tout au long du livre, l'auteur mélange avec brio fiction et travail journalistique. On sent que le récit est porté par un travail d'investigation mais sans pour autant que la lecture devienne ardue ou que l'on soit plongé dans un cours de géopolitique.
On ne sort pas vraiment indemne de cette lecture.
Catherine
Paru en janvier 2017. Existe aussi en format numérique.
Zeruya Shalev déroule et développe avec finesse et intelligence chaque minute qui compte dans les quelques semaines, à la fois ordinaires et terribles, qu'elle nous raconte dans Douleur.
Iris retrouve le grand amour de ses 17 ans et se pose cette question banale et effrayante : suis-je dans la bonne vie ? Question rendue plus aiguë et plus cruelle par la réminiscence soudaine des douleurs provoquées par un attentat qui l'a gravement blessée dix ans auparavant et qui a marqué sa famille, tant son mari que ses enfants qui sont aujourd'hui à l'aube de l'âge adulte.
Cette femme accomplie, volontaire, qui dirige une école avec force et générosité, voit soudain ses priorités basculer.
Un livre qui nous touche, nous parle, nous reconnaît. Tout se répond puis tout s'éclaire dans une langue envoûtante et précise. Un grand coup de coeur.
Natacha
Traduit de l'hébreu par Laurence Sendrowicz. Existe aussi en format numérique.
Wally Lamb est un conteur d'envergure, un fin disséqueur de l'âme humaine, un bâtisseur de récit hors-pair. Il le montre à nouveau dans cette mosaïque familiale où chaque protagoniste sollicite notre empathie et suscite notre attachement, chacun dans sa complexité, son humanité, son histoire, au travers de plusieurs décennies. Annie et Orion ont eu trois enfants, devenus adultes tous les trois. Ce sont principalement ces cinq personnages que nous écoutons et découvrons tour à tour avec leur itinéraire marqué par l'histoire de leur famille, mais aussi par celle de leur univers, l'Amérique de la seconde moitié du XXe siècle, dans laquelle la ségrégation raciale et les inégalités hommes-femmes marquent le paysage. Ce sont des trajectoires de libération que nous livre Lamb, trajectoires ponctuées par les drames et dans lesquelles la création et l'art jouent notamment leur rôle de puissant levier. Ceci est un livre magnifique.
Un roman attachant, très humain, dans l’Italie des années 50-60, à travers le regard d’Elena, petite fille puis adolescente, qui, poussée par sa famille, parviendra à faire des études. Elle raconte ce quartier populaire de Naples, où elle est née, et son amitié profonde avec Lila, l’enfant rebelle et surdouée. Un quartier toujours en ébullition, où la violence est courante, où les rancunes sont tenaces. Elena Ferrante étudie finement l’évolution des deux gamines, Elena et Lila, en proie aux doutes, comme toutes les adolescentes, face à elles-mêmes et à tout ce qui les entoure. Ambiance, charme, tendresse.
Voici peut-être une des oeuvres les plus personnelles de David Foenkinos. Il y raconte sa fascination pour Charlotte Salomon, cette artiste peintre expressionniste juive allemande, à la sensibilité écorchée, au destin marqué par la tragédie, fauchée à vingt-six ans par la terrible machine nazie. Si ce livre est d’abord le portrait bouleversant de Charlotte, depuis son enfance jusqu’à sa disparition dans les camps de la mort en 1943, il est aussi l’expression touchante de l’émotion de David Foenkinos pour cette artiste. Une émotion telle qu’il nous raconte avoir mis des années avant de trouver la forme pour écrire ce livre, une forme toute singulière puisqu’elle s’apparente davantage à de la poésie, faite de phrases courtes, de silences et de retours à la ligne, pour laisser respirer son texte, comme un hommage solennel. Un roman émouvant, tendre, à découvrir. Charlotte a reçu le prix Renaudot 2014 et le prix Goncourt des lycéens.
Fascinant roman au coeur du Texas. Une page de l’histoire des Etats-Unis, à travers les voix entremêlées de trois personnes d’une même famille de 1830 à nos jours. Eli, le patriarche, fils de pionniers, est enlevé par les Comanches. Il vivra trois ans parmi eux puis reviendra parmi les blancs. Peter, son fils, plus timoré que son père, a du mal à trouver sa place dans cette époque violente. Et enfin Jeannie, la petite fille de Peter, reprendra la direction du ranch et s’enrichira grâce au pétrole. De la lutte des Indiens pour sauvegarder leurs terres aux opérations menées par les Rangers, en passant par la Guerre de Sécession...un livre d’une grande densité. Philipp Meyer est un merveilleux conteur.
Ifemenu est une jeune Nigériane brillante qui décide, vers 20 ans, de partir en Amérique dans l’espoir de se garantir un avenir meilleur. En partant, elle laisse son grand amour Obinze, mais aussi une partie de son innocence de jeunesse. Ses débuts aux Etats-Unis ne sont pas simples. Une quinzaine d’années plus tard, Ifemenu décide de retourner au pays. Americanah est un grand roman sur l’Amérique et le rapport à la question de la race, et à l’identité. En effet, c’est en arrivant aux USA qu’Ifemenu devient «noire». Au-delà de cette thématique, c’est aussi la question de l’exil qui est explorée, et des retours au pays. Un roman qui se lit avec beaucoup de plaisir. D’une page à l’autre, on a les larmes aux yeux, on rit, on s’émeut des possibles retrouvailles des amants de jeunesse. On vibre avec Ifemenu.
Devenu avocat, Cañas défend Zarco, figure mythique de la délinquance post-Franco à Gérone et emprisonné depuis des années. Mais Zarco n'est pas n'importe qui pour Cañas. Adolescent, il a fait partie de sa bande durant un été qui l'a marqué pour toute sa vie. Ce qui se joue entre les lignes de cet excellent roman, c'est l'Espagne et la Catalogne après Franco, c'est le pouvoir de la presse, les ambigüités des humains, les fractures sociales... intelligemment détricotées par l'auteur, qui a le talent de ne pas lever tous les doutes.
Dans leur maison isolée dans la forêt, à 50 kilomètres de la ville la plus proche, deux sœurs adolescentes sont livrées à elles-mêmes. Sans électricité, sans eau courante, elles terminent peu à peu les stocks de nourriture de leur placard. Il n'y plus d'essence, ni chez elles ni ailleurs, les avions ne survolent plus leur parcelle et la radio n'émet plus aucun signal.
Nell et Eva continuent à se préparer pour l'avenir qui leur est promis - Harvard pour l'une, le ballet de San Francisco pour l'autre. Les semaines passant, elles vont devoir apprendre à se débrouiller pour survivre en attendant des jours meilleurs, en tirant parti de ce que leurs parents leur ont laissé et de ce que les livres leur apprennent, de leur jardin, et surtout de la forêt, inconnue et immense, tour à tour source d'inquiétude et refuge.
Ce roman écrit en 1996 (et traduit en français seulement en 2017) parle de l'adaptation et de la survie, dans un climat d'isolation et de fin de civilisation, où les jeunes filles se trouvent face à un avenir qui ne ressemble en aucun cas à ce qu'elles auraient pu imaginer.
Hélène
Traduit de l'anglais (États-Unis), par Josette Chicheportiche. Existe aussi en format numérique.
A l'Automobile Club, les diplomates anglais et la haute société égyptienne côtoient les serviteurs venus en grande partie des régions pauvres de la Haute-Égypte. Nous sommes dans les années 1940, l’Égypte est encore une colonie anglaise, les femmes commencent à entreprendre des études, des mouvements de protestation contre les Anglais sont en marche, l’Égypte est en pleine ébullition.
Ce roman très abouti, nous propose de rencontrer des personnages particulièrement attachants: une mère de famille et ses quatre enfants aux parcours et aux valeurs diversifiés, les domestiques du Club, les membres de la famille royale égyptienne... C'est une lecture excellente et instructive, dépaysante et passionnante. C'est une vraie porte d'entrée pour comprendre l'Égypte d'aujourd'hui, pour appréhender les positionnements complexes des Égyptiens qui doivent naviguer entre la modernité, le changement et le respect des traditions culturelles.
Alaa El Aswany, dentiste égyptien, par ailleurs fortement impliqué dans les révolutions promouvant la mise en place d'une démocratie en Égypte, avait déjà été remarqué pour son roman "L'immeuble Yacoubian" que nous vous recommandons également chaudement dans le collection poche Babel.
Dans ce magnifique roman fleuve, Tim Gautreaux nous invite à embarquer sur un bateau à aube, l'Ambassador, qui parcourt le Mississippi dans les années 1920. C'est l'époque de l’émergence du jazz qui tente d'adoucir les mœurs dans un monde violent et parfois fort miséreux.
L'Ambassador est un bateau dancing qui va de ville en ville, proposer des excursions pour quelques heures, une après-midi ou une soirée. Sur ce bateau, un orchestre composé soit de musiciens de couleurs, soit de musiciens blancs (s'alternant selon le lieu de l'escale) fait danser les passagers, souvent rustres et peu habitués à ce genre de festivités. On s'enfonce petit à petit dans des coins reculés, terriblement isolés, appartenant à un monde en voie de disparition, proche de celui de la conquête de l'Ouest.
Sam Simoneaux, héros de "Nos disparus", est rongé par la culpabilité. Il est persuadé d'être responsable de l'enlèvement d'une fillette de deux ans. Il se fait engager sur l'Ambassador dans l'espoir de la retrouver en parcourant le fleuve. Sur le bateau, il veille à l'embarquement, confisque les armes, tente de mettre un terme aux bagarres lorsque l'alcool a échauffé les esprits, joue aussi un peu du piano, et prend sous son aile la famille de la fillette disparue.
A travers l'intrigue sur cette disparition, c'est aussi la question du besoin de vengeance et de la nature de l'homme qui est questionnée. Ce roman nous plonge dans un ambiance incroyable, il vaut le détour.
Été 1936. L'Espagne est déchirée par une guerre civile d'une violence sans nom : les nationalistes phalangistes de Franco, soutenus par le clergé, imposent la loi de la terreur pour contrer les assauts impétueux des républicains qui rêvent de construire une nouvelle Espagne.
Dans ce roman, deux voix émergent et s'entrelacent, pour évoquer cet été sanglant. Deux voix très différentes mais deux voix sincères qui ont à cœur de livrer leurs souvenirs, leurs émotions, de témoigner. La voix de George Bernanos d'abord, qui, tout ultra catholique et monarchiste qu'il est, crie son dégoût et dénonce avec force l'épuration systématique dont il a été témoin à Majorque, perpétrée par les nationalistes. Celle de Montse ensuite, jeune fille de seize ans et mère de la narratrice, qui se souvient et raconte dans une langue unique, à mi-chemin entre le français et l'espagnol, tout l'émerveillement que provoqua en elle l'insurrection libertaire de cet été où le monde s'ouvrit à elle et où elle découvrit l'amour.
Lydie Salvayre nous livre ici une œuvre romanesque portée par un vrai souffle, et arrive à nous faire revivre cette sombre période de l'histoire, dans un petit village catalan avec ses ombres, ses secrets, ses peurs, ses haines fratricides. Elle nous impressionne surtout par son écriture vivante et forte, créative, vraiment surprenante.
Ce roman à obtenu le prix Goncourt 2014.
Tsukuru Tazaki est un ingénieur de trente-six ans qui semble détaché de la réalité. Il vit à Tokyo, construit des gares, n’a pas d’amis proches et n’entretient des relations amoureuses que de courte durée. Il mène une vie sans heurts et sans passions, sans couleurs, et ce, depuis seize ans, depuis le jour de ses vingt ans où ses quatre amis inséparables lui ont fait comprendre qu’ils ne voulaient plus jamais avoir affaire à lui, sans explications. Mais le jour où il rencontre Sara, dont il tombe amoureux, il accepte de revenir en arrière et de partir en quelque sorte en pèlerinage, pour retrouver ses amis perdus et essayer de comprendre les raisons de cette rupture brutale d’autrefois.
Haruki Murakami décrit avec réalisme mais beaucoup de subtilité et de finesse psychologique, les relations entre son héros principal et les personnages qui l’entourent et avec lesquels il essaie tant bien que mal de rentrer en résonance. Un roman juste, grave et emprunt de mélancolie qui nous plonge dans le Japon contemporain. Une très belle écriture aussi, fluide et sensible.
A Los Angeles, Tobar fait le récit implacable et plein d'humour de la mésaventure d'une nounou mexicaine, Araceli, au service d'une famille "bobo" à l'américaine qui, après une dispute, la laisse seule pendant quelques jours avec deux enfants de la famille.
Portrait d'une certaine Amérique, très documenté, très bien ficelé, personnages bien construits et attachants malgré une certaine ironie (voire une ironie certaine....) du narrateur à leur égard... Captivant.
Jack Luxton est assis, seul, avec son fusil, sur le lit conjugal, devant la mer et aussi devant le spectacle désolant, hors saison, des caravanes du camping qu'il possède avec sa femme sur l'île de Wight... Elle l'a quitté, pour la première fois, et il ressasse son incompréhension, son immense tristesse devant ce mystère qu'est l'amour... Celui d'Ellie, bien sûr, mais aussi celui de ses parents, de son frère Tom et même (surtout) celui de Luke, un chien, leur chien. Il est de la terre, celle du Devon, la ferme de ses ancêtres, il est parti, chassé par la mort de sa mère, le départ à l'armée de Tom, la mort du père mais surtout parce que leur monde, celui de l'agriculture, s'écroulait après la crise de la vache folle et aujourd'hui, il doit faire face à l'annonce du décès de Tom, au combat, si loin de lui...
Un roman extraordinaire, poignant, impossible à oublier.
Hallgrimur Helgason, auteur islandais, nous fait furieusement aimer la protagoniste de son roman-saga : Herra. Cette atypique octogénaire islandaise, en phase terminale d'un cancer, termine sa vie seule dans un garage et se raconte sur son lit de mort. Au gré de sa mémoire, le lecteur découvre le destin aussi noir que tendre de cette femme souvent malheureuse, souvent irrévérencieuse, mais toujours forte, qui a traversé le XXe siècle à 100 à l'heure et a été marquée au fer rouge par la guerre 40-45. Une femme qui a surtout gardé jusqu'à son dernier souffle une vraie rage de vivre.
Ce roman donne à découvrir toute une histoire méconnue de l'Islande et enthousiasme par sa truculence, sa vitalité mais aussi sa profondeur.
Surréaliste, drôle et tragique, Thomas Gunzig nous séduit encore dans ce roman par la vivacité de sa langue et la redoutable efficacité de sa narration. Un vrai bon roman belge qui nous tient en haleine mais qui est aussi et surtout une énorme critique sociale de la société de consommation et du marketing à outrance. Lecture savoureuse !
Ce roman est sélectionné dans le cadre du prix des lycéens 2014-2015 de la Communauté française.
Cette histoire rocambolesque nous entraîne dans les pas d'un fakir hindou, en quête d'un nouveau sommier à clous. Avec beaucoup d'humour et de finesse, derrière un récit à dormir debout, c'est une grande interrogation sur l'immigration et la question des frontières qui est posée dans ce roman.
L'écriture est de qualité, vive, dynamique et on ressort de ce bon moment de lecture avec des questions plein la tête. Un coup de cœur!