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Après le succès de Demain, Cyril Dion revient avec ce livre indispensable pour tous ceux qui se posent des questions sur notre monde en plein bouleversement face à l’urgence climatique. Si le constat écologique qu’il dresse est plutôt alarmant, Cyril Dion nous aide à prendre du recul et à nous affranchir des habitudes de nos sociétés capitalistes. Il propose des pistes en vue de construire un nouveau “récit“ collectif pour un monde qui fait sens. De quoi nous donner envie d’organiser la résistance. Utile et inspirant.
Delphine
Le quatrième volume de la collection Orbe aux éditions Esperluète est consacré à la philosophe des sciences Isabelle Stengers.
Un mot d'abord sur cette belle collection, Orbe, qui fait parler des auteurs ou des artistes sur leur pratique d'écriture et de lecture, ouvrant ainsi une fenêtre sur leur rapport au monde et leur "pensée".
Dans ce dialogue plein de vie, Isabelle Stengers évoque donc sa façon d'écrire, ce qui la fait vibrer, sa manière d'aller chercher des modes de pensée qui ne soient pas seulement ceux des sciences réputées exactes et héritières des Lumières et de Kant. Plutôt qu'un fil conducteur, ce qui jalonne l'entretien, ce sont des mots-amorces, comme autant de pierres pour traverser la rivière: étonnement, blanc, souffle, contrainte, nommer... C'est passionnant, passionnant et rafraîchissant de deviner la liberté d'esprit et la brillante intelligence de l'auteure de Au temps des catastrophes et de Une autre science est possible - entre autres.
Ce texte donne terriblement envie d'aller vers d'autres livres de Stengers, il est comme une amorce et un mode d'emploi, et recèle des morceaux de texte qui sont en soi des bijoux !
J'essaie de créer des mots, des manières de dire, de penser, d'écrire qui puissent donner des "Ah tiens, on peut faire ça!" dit-elle. Et en effet, quelle belle ouverture d'horizon on ressent à sa lecture !
Natacha
Voici un livre ambitieux, qui ravira autant les historiens que les amateurs d’Histoire(s), tant ce livre nous offre une balade originale à travers le monde et son histoire. Neil MacGregor est un historien de l’art de réputation mondiale et, tandis qu’il était le directeur du British Museum, il a initié une série radiophonique sur la BBC pour raconter l’aventure de l’humanité à travers les histoires de cent objets (issus des collections dudit musée) fabriqués, utilisés, vénérés ou mis au rebut par l’homme. Entre une maquette de vaches en argile égyptienne (3500 av. J-C) qui rappelle l’importance du bétail et le rôle sacré de cet animal, le miroir en bronze japonais (1100-1200) qui nous raconte un moment de l’ancien Japon et la capacité des miroirs japonais de permettre aux humains de parler aux dieux, et la carte de crédit (2009) qui symbolise la liberté économique et notre rapport à l’argent, ce pavé captivant nous entraîne sur ces traces historiques de façon ludique et intelligente. Fabuleux !
Catherine D.
Paru en septembre 2018. Existe aussi au format numérique.
Le saviez-vous? Le GSP trouve son origine dans le brevet déposé en 1941 par une certaine Hedy Lamarr, actrice sulfureuse hollywoodienne et scientifique autrichienne, pour un système secret de communication pour le guidage des torpilles ! Et sans l’invention du tube de peinture par le peintre américain John Goff Rand, les impressionnistes auraient passé leur tour... Quant à la margarine, elle doit son invention au concours organisé par Napoléon III en 1869 qui voulait approvisionner la Marine à moindre coût en cherchant à remplacer le beurre ! Voilà trois exemples de la multitude d’inventions, connues et méconnues, reprises dans ce beau livre, qui trouvera facilement sa place au pied du sapin.
Catherine D.
Paru en février 2018.
Elizabeth L. Banks est une de ses pionnières du journalisme d’immersion qui, comme Nelly Blye, défraya la chronique à la fin du XIXe et au début du XXe siècle par ses enquêtes journalistiques dérangeantes.
La jeune Américaine éprise de liberté débarque à Londres en 1892 dans l’espoir d’y percer dans le journalisme. Pour décrocher ses premiers papiers dans la presse, elle décide d’interpréter différents personnages afin d’enquêter au coeur des métiers qui font l’objet de son travail : se faisant passer tour à tour pour une domestique, une blanchisseuse, une bouquetière, une balayeuse de rue ou une riche héritière américaine, elle n’aura jamais froid aux yeux et publiera des textes engagés, signés d’une plume franche et caustique, mettant en scène une société anglaise victorienne sur le déclin.
Ces (mé-)saventures, rassemblées dans ce volume et traduites en français pour la première fois, se lisent comme un témoignage historique qui n’a pourtant pas pris une ride ! Vivifiant.
Delphine
Paru en octobre 2018. Existe aussi au format numérique.
Encore une pépite publiée par les géniales éditions Allia !
Herman Van Breda, prêtre franciscain et philosophe, est doctorant dans les années 1930 et s'intéresse à la phénoménologie d'Husserl, philosophe allemand d'origine juive qui décède en 1938. A ce moment-là, Van Breda prend conscience que les travaux d'Husserl (ses nombreuses notes et archives, et sa bibliothèque) sont en danger, vu la montée du nazisme et l'hostilité du régime vis-à-vis de tous les penseurs et scientifiques juifs. Herman Van Breda va alors se rendre chez l'épouse d'Husserl, à Fribourg, là où la majorité des ses archives sont conservées, et mettre sur pied le sauvetage de ses documents, et leur conservation jusqu'à la fin de la guerre.
C'est le récit de ce sauvetage que Van Breda rédige en 1958 et que les éditions Allia rééditent aujourd'hui dans leur très belle petite collection à 6,20€. Cela peut sembler anecdotique et peut-être pas très passionnant comme sujet... Détrompez-vous! Cela se lit d'une traite, comme un récit d'espionnage. C'est aussi un excellent portrait de l'année 1938 en Allemagne et de la montée en puissance du régime nazi. Et c'est un bel éclairage sur le danger que courent les philosophes et les penseurs dans un régime totalitaire.
Ce sauvetage a permis non seulement de créer à Louvain le Fond des Archives Husserl qui est encore aujourd'hui reconnu internationalement, mais aussi et surtout de rendre accessibles, dans l'après-guerre, les idées du philosophe Husserl, père de la phénoménologie.
Catherine
Paru en octobre 2018.
David Graeber, anthropologue et économiste anglais, s'intéresse depuis de longues années au monde du travail. Il avait publié il y a quelques années un grand ouvrage sur la dette qui était déjà passionnant, ainsi qu'un livre sur la bureaucratie. Ici, Graeber nous présente un travail de plusieurs années autour de la notion de "bullshit jobs", qu'on pourrait traduire en français par "jobs à la con", "jobs vides de sens". Il ne s'agit donc pas de métiers pénibles physiquement, mais bien des activités professionnelles dont on ne perçoit pas le sens, l'utilité.
Tout est parti d'un article que Graeber avait écrit sur cette question, article paru dans de nombreux journaux de par le monde et qui a suscité de multiples réactions. L'auteur a reçu suite à cette publication beaucoup de témoignages de personnes qui se retrouvaient tout à fait dans ce qui était présenté dans l'article (avocats d'affaire, agents en télémarketing, consultants, huissiers, managers, fonctionnaires,...).
Il s'est alors décidé à approfondir cette question et pendant plusieurs années, il a collecté les témoignages, a analysé les études réalisées dans plusieurs pays sur cette question, celle de l'utilité perçue de son emploi par le travailleur lui-même. Les chiffres proposés sont impressionnants, voire inquiétants, car il estime qu'en Grande-Bretagne, par exemple, 30 à 40 % des travailleurs souffrent de ce sentiment d'inutilité sociale. Dans le livre, plusieurs pistes sont proposées pour comprendre ce phénomène. En effet, comment se fait-il que nous ne travaillions pas moins qu'il y a 50 ans (l'économiste Keynes avait en effet prédit dans les années 1930 qu'à la fin du vingtième siècle, les avancées technologiques permettrait de réduire la journée de travail à 3 ou 4 heures) ? Notre monde est-il en train de produire des boulots inutiles pour nous occuper ?
Intéressant aussi de découvrir que ces boulots vides de sens ne se cantonnent pas à une certaine catégorie d'emplois, mais sont disséminés dans tous les secteurs d'activité, et à tous les niveaux de pouvoirs des entreprises et des administrations.
Voici donc un ouvrage bien actuel, tout à fait pertinent et percutant, et pour couronner le tout, écrit avec humour. Une lecture instructive et agréable.
Catherine
Paru en septembre 20187. Existe aussi en format numérique.
Mary Beard, brillante spécialiste britannique du monde gréco-romain et Professeure à Cambridge (elle est notamment l'auteure de SPQR), examine dans ce manifeste les racines antiques de la misogynie et de la violence à l'égard des femmes qui s'expriment fort, qui dénoncent; qui briguent ou occupent des positions de pouvoir.
Ses exemples sont tirés de l'Histoire, de la politique contemporaine et de son propre vécu, et le texte est émaillé de références visuelles, photos ou dessins.
Comme souvent à la lecture d'un essai féministe, on est consterné.e par ce que l'on apprend et encouragé.e à ouvrir grand les yeux. Un petit livre édifiant.
Hélène
Paru en septembre 2018. Traduit par Simon Duran. Existe aussi au format numérique.